vendredi 28 mars 2025

Le pasteur Hervé Stücker 2017-2023



Hervé Stücker en 2017 à Lorient avant son départ pour Saint-Brieuc


Hervé Stücker est né le 28 janvier 1963 à Enghien-les-Bains (95) dans une famille très engagée dans la communauté protestante. A Ansnières-Bois-Colombes, Hervé Stücker découvre les activités de la maison de jeunes et du centre de rencontres de la paroisse.
Sur le plan de ses études, Hervé Stücker ne commence pas son cursus universitaire par la  théologie mais par une licence d'histoire puis un DEA (Diplôme d’Études Approfondies) en relations internationales, avant de compléter son cursus à l’École de journalisme de Paris.
Il se marie le 11 septembre 1993 avec Hervine Debroise (née le 12 octobre 1969 à Nouméa). Le couple va avoir quatre enfants : Bleuenn, 1995; Loéïza, 1997; Titouan, 1999; Analena, 2009.

A l’âge de 25 ans Hervé Stücker commence donc des études de théologie et près 5 années passées à l'Institut protestant de théologie, il devient pasteur et est ordonné en 1994.

Le pasteur Hervé Stücker
 
Hervé Stücker débute dans la paroisse de Niort (1994-2002) puis passe 15 ans dans la paroisse de Lorient-Vannes (2002-2009) et de Lorient-Quimper (2009-2017), avant d’arriver à Saint-Brieuc en août 2017.

Avant de partir de Lorient, il avait été interrogé dans Ouest-France sur ses souvenirs marquants dans cette paroisse :

"Je retiens notamment notre implication dans la Cimade pour l'accueil des migrants. Le foyer Robelin qui les accueille est fermé pendant la journée et on voit des gens errer dans les rues. Alors en 2013, on a créé le collectif Béthanie avec l'église catholique de Saint-Louis pour les accueillir. Je me souviens notamment d'une famille albanaise qui est arrivée en plein hiver avec un bébé d'un mois et de l'élan de solidarité qui les a accompagnés. Ce sont des moments de partage humains très forts".
 
En 2018 à St Brieuc

 
La cérémonie d'installation à Saint-Brieuc s'est déroulée devant une large assistance et Guillaume de Clermont, le Président de la Région, était présent à cette occasion.

Hervé Stücker et Guillaume de Clermont. Photo Ouest-France 24 avril 2018
 
Hervé Stücker a poursuivi les actions mises en place précédemment, comme les études bibliques, mais il a aussi imprimé sa marque par exemple en proposant des cultes différents (culte café-croissant, culte autour d'un thème...). Il a œuvré pour monter le dossier des travaux nécessaires au temple. Le montage du plan financier lui doit beaucoup.
Les différents confinements causés par la crise du Covid19 et les restrictions sanitaires qui ont suivi ont été des moments difficiles où il fallait malgré tout maintenir le lien avec tout le monde.
 
Hervé Stücker a quitté la paroisse de Saint-Brieuc pour partir à Rennes en juillet 2023. Un départ fêté à Perros-Guirec, dans la joie ! Vous pouvez retrouver l'actualité d'Hervé Stücker dans la paroisse de Rennes en visitant le compte Facebook (cliquer ici)
 
Départ d'Hervé Stücker. Juin 2023 Perros-Guirec

Nomination au Conseil national en 2025
L’assemblée générale de la Fédération Protestante de France (F.P.F.) s'est tenue à Sète, du 24 au 26 janvier 2025. À cette occasion, la Pasteure Emmanuelle SEYBOLT, Présidente du Conseil national de l’Église Protestante Unie de France (E.P.U.d.F.) a sollicité le Pasteur Hervé STÜCKER pour rejoindre le conseil de la F.P.F. en tant que membre du collège de l’E.P.U.d.F. Ce conseil, autour de son Président le pasteur Christian Krieger, se réunit 4 fois par an. 
Hervé Stücker, membre du Conseil national, janvier 2025

 

Sources
Cette biographie a été vérifiée et complétée par Hervé Stücker lui-même.
 
Lien
Article du journal LeTélégramme du 6 mai 2018 à l'occasion de la consécration du pasteur Hervé Stücker à St Brieuc.

 

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vendredi 7 mars 2025

Histoire de l'école évangélique de Trémel (22)

La commune de Trémel possède environ 1000 habitants entre 1841 et 1911 mais sa population ne cessera de diminuer à partir de 1911 pour se situer autour de 400 habitants de 1980 à nos jours.   

Cette petite commune aurait pu passer totalement inaperçue mais elle a une particularité : aux alentours de 1840, le pasteur gallois John Jenkins, y fonde une mission protestante. En 1859 Jean-Marie Guillou, collaborateur de J. Jenkins, établit un contact avec Marie Lecoat, fille de Guillaume Ricou (collaborateur de Jenkins pour la traduction de la Bible en Breton). Marie Le Coat devient protestante et J. Jenkins l'engage comme institutrice à domicile pour les enfants de Trémel. Son fils, Guillaume Lecoat (né en 1845), rejoint sa mère dans cet engagement.

J. Jenkins fait alors bâtir une chapelle à Uzel, commune de Trémel, en 1861 (qu'il appelle Hengoed, du nom de sa paroisse d'enfance au Pays-de-Galles).

La mission évangélique de Trémel est donc d'abord le fruit de l'action de J. Jenkins, qui l'a animée pastoralement comme il le pouvait dans les années 1860, avant de la confier à Guillaume Lecoat, petit-fils de G. Ricou, qui l'a développée d'une façon assez extraordinaire.


Guillaume Le Coat, 1845-1914

Guillaume Le Coat, né à Trémel en 1845, se convertit au protestantisme après avoir entendu un colporteur évangélique. C'est lui qui tiendra un rôle très important dans cette histoire de l'école évangélique de Trémel, du fait qu'il va acquérir une formation d'instituteur à l’École normale protestante de Courbevoie.  Revenu diplômé, il rentre à Trémel en 1866 et fait construire un centre missionnaire, autour de la chapelle protestante, avec en particulier un orphelinat et des écoles. 

 

Les débuts difficiles de l’école évangélique de Trémel
Les premiers cours scolaires gratuits sont donnés dans la chapelle de 1872 et ce jusqu’en 1894. L’école est fondée officiellement le 21 mai 1872. Au jour de l’ouverture, le 25 mai 1872, il n’y a qu’un seul élève mais à la fin du mois il y en a 17 (Le Trémélois 25 janvier 1892). Pour M. Le Coat, la partie n’est pas facile car il subit des pressions du maire qui est un défenseur de l’enseignement catholique et du curé. Les deux veulent faire fermer cette école.

Le dossier conservé aux archives départementales sur les créations d’écoles rend bien compte de la pugnacité de M. Le Coat dans son œuvre de scolarisation des enfants.
Par un courrier adressé à M. Brunet au Ministère de l’Instruction publique en 1877, M. Le Coat pour faire évoluer le statut de son école souhaite que son école soit mise au nombre des établissements libres dans lesquels les maîtres peuvent contracter et réaliser l’engagement décennal au point de vue de la dispense militaire. Après enquête du préfet et de l’Inspecteur primaire de Lannion, il est établi que  « l’école libre protestante dont il s’agit est fréquentée par des enfants tant catholiques que protestants appartenant à des familles des communes de Trémel et de Plounérin (Côtes-du-Nord) et de Plouégat-Moysan (Finistère)". De plus la délibération du Conseil Départemental du 21 septembre 1877 indique « qu’aucun motif réel d’utilité publique ne justifie la faveur sollicitée. » Le Conseil considère que « la commune de Trémel est pourvue d’une école publique de garçons et d’une école publique de filles et que l’école dirigée par M. Le Coat n’est fréquentée que par une quarantaine d’enfants, nombre qui n’exige pas absolument la création d’un poste d’instituteur adjoint ». En conséquence, la demande de M. Le Coat est rejetée (Courrier du Ministère, 17 novembre 1877, archives départementales 22).
Le 30 janvier 1878, M Le Coat écrit au nouveau Ministre de l’Instruction publique, des Cultes et des Beaux-Arts. Le ton est différent car après des élections le 14 octobre 1877, la gauche obtint une majorité et Joseph Brunet (Ministre du 17 mai au 22 novembre 1877) fut relevé de ses fonctions, « un ministre duquel, nous protestants républicains, nous n’avions rien à espérer… Aujourd’hui, le gouvernement a toutes nos sympathies… », écrit M. Le Coat. Dans ce contexte M. Le Coat réitère sa demande. Il ajoute que depuis sa création en 1872, 163 élèves ont fréquenté cette école libre et gratuite. Actuellement, elle accueille 44 garçons et 51 adultes. L’école est installée dans un hameau situé entre différentes communes et reçoit des élèves « qui sont dans l’impossibilité de fréquenter aucune autre école. » Et M. Le Coat de terminer dans une conclusion lyrique : « Persuadé que l’Instruction de nos compatriotes est la meilleure garantie pour notre République et le chemin le plus sûr pour nous conduire aux Vérités éternelles de notre Salut, j’ose compter sur une réponse favorables de votre Excellence et pouvoir encore fonder une autre école à quelque distance d’ici. »
Mais M. Le Coat va être déçu car le Ministère ne désavoue pas l’assemblée départementale. En effet, une délibération du Conseil Départemental du 21 janvier 1878 a encore estimé  que « la faveur sollicitée n’était nullement justifiée par un motif d’utilité publique. » (Courrier du Ministère au Préfet du 12 février 1878).
Nouvelle demande de M. Le Coat en 1882, pour les deux écoles de garçons, libres et gratuites, situées à Trémel et à Plouégat-Guérand (Finistère). Et en 1883, la situation évolue enfin. Par un courrier du 1er avril 1883, M. Médard Harrioo-Chou, instituteur arrivé par train de la région d’Orthez dans le Béarn, en Février 1883 (article J-Y Carluer http://protestantsbretons.fr/docs-cont/un-protestant-bearnais-en-basse-bretagne/), sollicite le maire de Trémel en vue de l’ouverture d’une école libre et gratuite de garçons et d’un cours d’adulte. Le 16 avril 1883, l’Inspecteur d’académie indique au Préfet que l’instituteur a fourni toutes les pièces justificatives et que « le local désigné pour la tenue de l’école projetée n’a donné lieu à aucune observation de la part de M. le Maire. C’est d’ailleurs le même que celui qui sert actuellement à la tenue de l’école dirigée par M. Le Coat Guillaume ; car il ne s’agit pas de l’ouverture d’une nouvelle école mais bien d’un changement dans la direction existante. J’estime donc qu’il n’y a aucun motif d’opposition. » Le Préfet entérine la décision le 1er mai et transmet au sous-préfet de Lannion. Alors que le dossier semble bien avancé, dans un courrier du 5 août 1884, l’Inspecteur d’Académie s’adresse au Préfet des Côtes-du-Nord en affirmant que pour lui rien n’a changé depuis la demande en 1877 et même pire, l’école n’a plus qu’une moyenne de 25 à 30 élèves. Faisant référence au fait que si les maîtres de cette école sont admis à réaliser l’engagement décennal, ils sont dispensés de service militaire, l’Inspecteur termine son courrier de la sorte : « La présente demande est particulièrement inopportune en présence de la loi sur l’obligation de service militaire ».
En octobre et novembre 1884, nouveaux échanges de courriers mais concernant le départ de l’instituteur M. Harrioo-Chou et la reprise de la direction par M. Le Coat dans un local d’une longueur de 11 mètres, d’une largeur de 7 mètres et de 6 mètres de hauteur, « percé à jour au moyen de deux fenêtres et une porte au sud, 2 fenêtres au nord et d’un œil de bœuf et d’une porte au levant ». (27 octobre 1884)

 

Faire venir de potentiels donateurs à la mission

M. Le Coat a bien conscience que l'oeuvre qu'il entend développer dépend des donateurs et ils n'aura de cesse de s'adresser à eux. Ces derniers viennent le plus souvent des îles anglo-normandes et d'Angleterre. 

 

Dons, 25 janvier 1890 Le Trémélois

Pour leur faire connaitre ce qui a déjà été réalisé, M. Le Coat fait des tournées d'information et publie des informations pratiques par l'intermédiaire de son journal Le Trémélois.

25 juillet 1892 Le Trémélois. Photo RF

Jusqu'au début des années 1900, M. Le Coat ne relâchera pas ses efforts pour donner tous les renseignements pratiques pour ses visiteurs d'Outre-Manche, se transformant quasiment en agence de voyage avec comme base Trémel : "Une place de repos et de bon air, très pittoresque et entourée de vieux monuments druidiques, d'antiquités romaines, de ruines de vieux châteaux et de vues pittoresques pour les photographes et les peintres". M. Le Coat détaille ensuite un programme de visites de 15 jours à partir de Trémel avec Morlaix, Roscoff et Saint-Pol-de-Léon, Tonquédec, Trégastel, Perros etc.  (Le Trémélois 1er juin 1908)

 

Les débuts de l'école évangélique de filles

L'école évangélique de filles de Trémel est inaugurée en 1888. Elle est implantée à Uzel, sur la route menant à Plouégat-Moysan. Dans l‘édition du journal Le Trémelois du 25 mars 1888, on peut lire : « Notre école évangélique, construite aux frais de notre chère sœur en christ, Mrs Ball, en souvenir affectueux de feue Agnès E. Ball, sa bien aimée fille, quant à l’intérieur est terminée. » Cet entrefilet explique donc l’origine du nom « Ecole Agnès » qui restera pour désigner l’école de filles de la mission de Trémel.
Et si l’école est construite, tout n’est pas réglé : dans le même numéro du Trémelois, Mme Gertrude Le Coat lance un appel vibrant pour trouver « la chrétienne zélée et dévouée que nous désirons placer à la tête de cette école ». Mme Le Coat ne dispense que des cours de couture pour trente-cinq élèves, femmes et filles. Mais ce n’est pas comparable à l’enseignement général pour les garçons, déjà développé à Trémel et Pont-Ménou.

Gertrude Le Coat, née Shaw, photo Le Trémélois 25 avril 1893
 

Gertrude Shaw est née à Ploubezre, de parents protestants, devenue catholique dans un couvent à l'insu de ses parents, convertie à l'Evangile en 1867, mariée à G. Le Coat le 1er octobre 1868.


Une école de filles 1888
Les échanges de courriers avec les autorités reprennent le 2 septembre 1888 avec la demande d’ouverture d’une école de filles adressée au maire de Trémel M. Rebillard. On y apprend que l’institutrice qui déclare ouvrir cette « école libre Évangélique de filles » est Adèle Amélie Bourquin, 22 ans, née le 6 mars 1866 à Chenebier, canton d’Héricourt dans la Haute-Saône. Adèle Bourquin est pourvue du Certificat d’Études, du Brevet élémentaire et a exercé depuis 1884 comme institutrice à Levallois-Perret à côté de Paris et ensuite en Angleterre. (Adèle Bourquin est née le 6 mars 1866, mariée avec Constant Henri Louys à Chenebier en Haute-Saône)
L’école ouvre en octobre (à vérifier le 1er ou le 6 ?). L’école est construite grâce à un don de Mme Ball (Le Trémelois, 25 mars 1888)

Plan publié le 25 mars 1888 dans Le Trémelois. Photo RF

Adèle Bourquin s’en va et le 29 juillet 1890, Léonie Hennequin, directrice de l’école évangélique de filles de Trémel, informe le Maire de son intention d’annexer un pensionnat primaire (ouvert en 1885) à l’école de filles. Ce pensionnat est construit au pignon sud de l’école. Il est divisé en un rez-de-chaussée éclairé par quatre fenêtres. Un escalier en bois conduit au premier étage éclairé par cinq fenêtres, divisé en deux chambres. On trouve aussi une partie mansardée. Entre la maison d’école et le pensionnat on a une antichambre avec baignoire. Le projet consiste à déplacer l’école dans le rez-de-chaussée du pensionnat et de convertir la salle de classe du moment en réfectoire. Les dortoirs seront installés au premier étage et dans la pièce mansardée.


Fête scolaire, 25 septembre 1890 Le Trémelois. Photo RF


Les récompenses du travail effectué
Le 15 août 1888 a lieu la distribution des prix. Pour la première fois les petites filles de l’école y assistent mais un drame est arrivé puisque le première institutrice nommée décède rapidement. (Le Trémélois, 25 août 1888)

 

Changements dans le personnel 1890-1891
Comme à chaque changement dans le personnel enseignant, une déclaration d’ouverture d’école est adressée aux autorités même s’il ne s’agit en fait que d’un changement de personne. Ainsi, le 19 octobre 1890, Charles Robert Flon, domicilié à Saint-Just-en-Chaussée dans l’Oise, déclare son intention de prendre la charge de l’école évangélique de garçons et du cours d’adulte, dans le local de la chapelle protestante. Les états de service de l’instituteur sont mentionnés dans le détail : octobre 1880-octobre 1881, Wallincourt (Nord) ; octobre 1881-octobre 1882, Montpont (Saône-et-Loire) ; octobre 1882-juillet 1883, Issy-les-Moulineaux (Seine) ; juillet 1883-octobre 1887, Saint-Germain-en-Laye (Seine-et-Oise) ; octobre 1887-octobre 1890, Saint-just-en-Chaussée.

Le 25 février 1891, une demande similaire est adressée aux autorités pour l’ouverture de l’école de filles et de son pensionnat, par Lina Marguerite Stoffel, née le 9 mars 1861 à Osne-le-Val dans la Haute-Marne, où elle réside alors. (photo archive 1861 naissance) Lina Stoffel a dix années d’expérience dans le métier :
1881-1883, Fresnoy-le-Grand (Aisne)
1883-1886, Concorès (Lot)
1886-1888, Saint-Dizier (Haute-Marne)
1888-1891, Odessa (Russie), dans une famille.
Le papier à en-tête utilisé par M. Le Coat pour ses démarches administratives montre le développement conséquent de l’œuvre de Trémel. (photo)

Par un courrier adressé au Préfet, le 28 décembre 1891, M. Le Coat fait part de son intention de reprendre la direction de l’école.



La construction d'un bâtiment pour l’école de Garçons
A Trémel les garçons étaient instruits dans la chapelle. Mais plus tard, un terrain pour l’école de garçons est acheté par le Docteur Underhill (Edward Bean Underhill, pasteur baptiste, ancien missionnaire aux Indes, en Amérique, en Afrique, fut « le plus grand ami et soutien de l’évangélisation de la Bretagne bretonnante » d’après G. Le Coat. Cité dans protestants en centre-Bretagne https://www.histoire-et-protestants-en-centre-bretagne.fr/2021/04/17/le-rayonnement-de-la-mission-evangelique-de-tremel/, (Journal Le Trémélois,  juin 1901). A sa mort,  E. Bullinger  présida le comité de la M.E.B . « et  les fonds pour la construction recueillis par le bazar de Guernesey » (Thèse page 87). La construction du bâtiment de l’école de garçons vient mettre un terme à l’enseignement dispensé dans la chapelle. Le chantier commence en 1892 et se termine en août 1894. Un nouveau bâtiment était vraiment devenu nécessaire car les effectifs augmentent. Le projet mené par M. Le Coat a été mené comme suit (courrier du 5 octobre 1894 au maire de la commune) : l’école de garçons et le cours d’adultes sont transformés en orphelinat, l’école est déplacée dans un nouveau bâtiment construit à cet effet à cent mètres de l’ancien. M. Le Coat totalise alors vingt-deux années passées dans l’enseignement.

Le personnel 1894-1898
La direction de l’orphelinat de filles est confiée (courrier 29 octobre 1894) à Mlle Amélie Elisabeth Cheyre, née à Privas en Ardèche, demeurant 17 Cours du Palais à Privas. Les derniers postes occupés par l’institutrice libre durant ces dix dernières années ont été Privas, Montpellier (Hérault), Neuchâtel (Suisse). PHOTO
En 1895, suite à une maladie contractée par Mlle Cheyre, arrive une nouvelle directrice. Il s’agit de Mlle Roy, née le 20 juin 1869 à Thiat en Haute-Vienne. Lors des dix dernières années Mlle Roy a occupé des postes à Thiat de 1885 à 1890, à Saint-Jean-du-Gard, avec son frère pasteur, de 1890 à 1895 ; et avant d’arriver à Trémel, à la famille Évangélique de la Force en Dordogne. (courrier du 15 août 1895)
Quasiment dans le même temps, une autre déclaration d’intention de prendre la direction de l’école orphelinat est envoyée le 25 septembre 1895 au Maire et transmise au Préfet. La nouvelle directrice est Alice Savoye, née le 23 février 1867 à Marsillargues dans l’Hérault. Ses deniers postes occupés ont été, de 1885 à 1889, collège d’Albi (Tarn) ; de 1889 à 1891, Nérac (Lot-et-Garonne) ; 1891 à 1892, Bruxelles ; 1892 à 1895, Albi.
Comme l’écrit la nouvelle directrice, son arrivée survient après le « poste laissé vacant par la maladie de Mlle Amélie Cheyre et l’incident arrivé à Mlle Roy ».
Une autre institutrice, au moins, exercera le poste de directrice après Alice Savoye et avant le mois d’août 1899, il s’agit de Mlle Hugon.

La déclaration d’intention adressée au Maire de Trémel pour prendre la direction de l’école orphelinat est envoyée de Versailles le 17 août 1899. La nouvelle directrice est Pauline Ringstrom. Lors des dix dernières années Mlle Ringstrom a suivi des cours au Lycée de Versailles de 1888 à 1890, a vécu en Angleterre de 1890 à 1892, a travaillé en qualité d’adjointe à l’Institution de Mlle Bellanger à Versailles, a enseigné le français en Suède de 1894 à 1898, avant de revenir comme adjointe dans l’Institution de Mlle Bellanger avant de venir à Trémel.

En prenant connaissance de ces différents parcours professionnels, ayant souvent une ouverture à l’international, on mesure la difficulté pour M. Le Coat de pouvoir retenir pendant de longues années des jeunes filles très instruites au cœur de la campagne bretonne.


Une école attaquée par le clergé catholique

Le 2 septembre 1900, le journal Le Pays attaque la Mission de Trémel comme étant à la solde des Anglais. Une caricature fait dire au pasteur sur l'image : "Celui qui chantera le mieux le God save the Queen, aura la belle Bible offerte par le général Anglais".

Caricature dans le journal Le Pays. 2 septembre 1900

 
Première page du journal Le Pays. 2 septembre 1900

En 1900 toujours, le journal La Croix titre sur "L'invasion Anglo-protestante" à propos de l'inauguration de l'école des filles de la "Mission évangélique bretonne".

La Croix 2 mai 1900

En 1900, le recteur de Trémel, l'abbé Camus, publie un opuscule "Notes & Documents relatifs à une tentative d'invasion du protestantisme Anglais en Bretagne."

Abbé Camus. Diocèse de Saint-Brieuc. Photo Richard Fortat

 

Le développement de l'école, début du XXe siècle

Toutes les attaques n'empêchent pas l'école de poursuivre son travail. En 1905, les récompenses sont nombreuses pour les élèves, garçons ou filles, des écoles de Trémel. Cela concerne le concours général des écoles protestantes où Alice Meng se distingue particulièrement mais il faut citer aussi Catherine Corvez, Sara Tréché, Hélène Sommerville et Maria Le Goff.

D'autre part, le Certificat d’Études Primaires est passé avec succès par Yves-Marie Bastard, Eugène Harrioo et François Le Goff et Marie-Françoise Le Caz.

1er août 1905 Le Trémelois. Photo RF Musée d'Histoire du Protestantisme Paris

 

D’après Jean-Yves Carluër, en 1907, une centaine d’enfants sont scolarisés à l’école évangélique.



En 1912, trois garçons et trois filles se préparent au Certificat d’Études Primaires comme nous l'apprend l'édition du Trémélois du 1er juin 1912. Mais cet entrefilet évoque aussi les graves soucis de santé de deux jeunes filles de Trémel (amputation, paralysie). On note aussi que les jeunes filles sont souvent placées en Angleterre ou dans les îles Anglo-Normandes après leur scolarité à l'école de Trémel.




L'école évangélique vue par l'école publique

De son côté l’école publique de Trémel possède une école de filles et plus tard une école mixte dirigée en 1939 par Mme Kerharo et avec une autre classe, celle de Mlle Pichon. Elle est située au 11 rue de l’école.
Cette école accueille les enfants du bourg et aussi les "transfuges" venant de l’école évangélique ou de l’école privée catholique. Conservé aux Archives départementales des Côtes d’Armor, le registre matricule de l’école publique de filles de la commune de Trémel nous permet de chiffrer le déplacement des enfants entre l’école publique, l’école privée et l’école évangélique. Les transferts d’une école à l’autre sont particulièrement nombreux ce qui entraine une grande instabilité dans les effectifs de l’école publique. Au total, entre 1907 et 1934, on va enregistrer 2 départs du public vers l’école libre (catholique), 23 arrivées de l’école libre (catholique),  2 départs vers l’école évangélique, 57 arrivées de l’école évangélique dont 37 entre 1930 et 1934, un moment où la Mission rencontre des difficultés.

1907 : 2 départs vers l’école évangélique, 1 arrivée de l’école évangélique
1908 : 1 arrivée de l’école évangélique
1909 : 4 arrivées de l’école évangélique
1912 : 8 arrivées de l’école privée
1916 : 2 arrivées de l’école évangélique
1920 : 2 arrivées de l’école privée, 1 arrivée de l’école évangélique
1922 : 8 arrivées de l’école libre, 1 arrivée de l’école évangélique
1923 : 3 arrivées de l’école libre, 2 arrivées de l’école évangélique
1925 : 3 arrivées de l’école évangélique
1926 : 5 arrivées de l’école évangélique
1927 : 2 arrivées de l’école libre,  2 arrivées de l’école évangélique
1928 : 1 arrivée de l’école évangélique
1929 : 1 arrivée de l’école évangélique
1930 : 23 arrivées de l’école évangélique
1931 : 5 arrivées de l’école évangélique
1932 : 3 arrivées de l’école évangélique
1933 : 3 arrivées de l’école évangélique
1934 : 3 arrivées de l’école évangélique

 

Liste des élèves filles de l'école de Trémel de 1888 à 1906

L'école des filles. 1er février 1906 Le Trémelois. Photo RF mars 2024
 



 

Liste des élèves filles ayant fréquenté à un moment l’école évangélique de Trémel

D’après le registre de l’école publique de filles de Trémel (archives départementales), en regardant les entrées et les sorties, on peut établir une liste des élèves ayant fréquenté à un moment l’école évangélique de Trémel :
Huby Yvonne, née le 27 septembre 1897
Thépot Lucienne, née le 22 septembre 1898
Herry Yvonne, née le 17 février 1899
Herry Eugénie, née le 19 juin 1902
Herry Marie, née le 5 juin 1908
Boulanger Marie, née le 4 juillet 1902
Person Léonie, née le 2 décembre 1904
Martin Jeanne-Marie, née le 28 juillet 1902
Martin Marguerite, née le 17 mai 1903
Martin Augustine, née le 3 juillet 1909
Le Roy Sophie, née le 14 mars 1909
Le Roy Léonie, née le 28 avril 1912
Piolot Francine, née le 13 juin 1913
Le Gall Yvonne, née le 3 octobre 1915
Le Guern Cécile, née le 5 juin 1913
Le Guern Anna, née le 13 avril 1916
Quélen Marcelle Marie, née le 2 janvier 1912, Kérity, orpheline chez Mlle Le Quéré Uzel en Trémel, partie bonne à Paris en 1926.
Courson Léa, née le 27 mars 1912 Saint-Brieuc, enfant abandonnée, chez Mlle Le Quéré Uzel en Trémel, travaille à Uzel.
Le Grall Madeleine, née le 15 novembre 1912 Plourac’h, chez Mlle Le Quéré Uzel en Trémel, décédée en 1927.
Sourimant Anna, née le 22 février 1916 Trémel, travaille à la tricoterie d’Uzel
Sourimant Louise, née le 3 novembre 1919 Trémel, travaille à la tricoterie
Quélen Lucienne, née le 19 janvier 1914 Kérity, père décédé, chez Mlle Le Quéré Uzel en Trémel
Silliau Marie, née le 25 juillet 1913 Huelgoat, chez Mlle Le Quéré Uzel en Trémel
Rolland Marie, née le 10 juin 1913 Plougras, mission évangélique
Rolland Rosalie, née le 26 juin 1916 Bolazec, mission évangélique
Silliau Marie-Françoise, née le 28 novembre 1916 Huelgoat, mission évangélique
Piolet Germaine, née le 17 juin 1917 Plounérin

 

Liste des 410 élèves garçons de l'école de Trémel de 1888 à 1906

L'école des garçons. 1er février 1906 Le Trémelois. Photo RF mars 2024





 

Le Noël 1908

Un vrai petit régal avec l'évocation de ce Noël 1908 dans l'édition du Trémelois du 1er février 1909.





Mariages et enterrements à Trémel

Dans l'édition du Trémelois du 1er janvier 1912, Guillaume Le Coat, fait état de deux mariages dont l'un se déroule à Trémel, entre Yves-Marie Le Lan et Marie-Claudine Le Long, en présence du missionnaire M. Terrell de Paimpol.


Et dans l'édition du Trémelois du 1er mars 1912, Guillaume Le Coat, dresse la liste de toutes les personnes enterrées à Trémel. Pour l'histoire de cette communauté ces renseignements sont précieux et peuvent permettre de retracer des parcours singuliers dans le monde protestant en Bretagne.




Après la seconde guerre mondiale

La photo ci-dessous présente le sonneur Louis Abgrall qui, au nom de Dañs Treger, a remis à Thérèse Bourhis, maire, un exemplaire du mémoire de maîtrise sur "Le protestantisme à Trémel", de Jean-Gabriel Fichau, en présence de Robert Somerville, pasteur retraité, à droite.

 

Trémel Le Télégramme 10 novembre 2010


Un article du journal Le Télégramme daté du 10 novembre 2010 évoque la vie de l'orphelinat et du Foyer des enfants à la Mission de Trémel :

"Localement, les Trémelois se souviennent de l'orphelinat de jeunes filles et du foyer qui accueillait des jeunes gens en difficulté, après la Seconde guerre mondiale. «J'ai gardé des contacts avec des enfants qui y ont été élevés», indique Robert Somerville. Qui a lui-même animé des camps de jeunesse à Trémel, avant de les déplacer à Plougasnou, plus accessible et plus proche de la mer. C'est en 1974 que la Mission bretonne de Trémel a fermé ses portes. «Cela devenait difficile pour deux raisons: la DDASS voulait tout contrôler, c'était devenu une institution religieuse suspecte. Et c'était l'époque du laisser-aller chez les moniteurs. Quand le foyer a fermé, l'église aussi a fermé», résume Robert Somerville".


Trémel 1er juillet 1948 Ouest-France
 
Uzel en Trémel, image Google Map.

Sources

Archives départementales des Côtes-d'Armor : 1T195, création d’écoles et d’emplois ; 1T289 ouverture d’écoles libres

Journal Le Trémélois, consultation de la collection disponible au Musée d'Histoire du Protestantisme à Paris en mars 2024.

Site Protestants bretons, Jean-Yves Carluer, portrait de Guillaume Le Coat, ici

Site Wikipédia, commune de Trémel, ici

Histoire des protestants en Centre-Bretagne, article sur la Mission de Trémel, ici 

Inventaire du patrimoine culturel en Bretagne, mission protestante de Trémel, ici 

Le Trégor, article du 30 novembre 2021, ici 

Fichau, Jean-Gabriel, “Trémel, centre du protestantisme en Bretagne au XIXe siècle,” XIXe siècle en mémoires, Archives départementales (Côtes-d'Armor) - 500J/91

 


jeudi 20 février 2025

André Féat (1916-1945), pasteur de l’Église Baptiste de Morlaix, Résistant et déporté.

André Féat est un pasteur de l’Église baptiste de Morlaix qui était résistant. Il a été déporté au camp de Flossenbürg et il est mort à Dachau en 1945. 

A partir de cet article, des recherches menées début 2025 par Carole Féat, la petite fille d'André Féat. Ces nouveaux éléments, en particulier sur le sauvetage de juifs, vont permettre d'enrichir notre connaissance de l'action de ce jeune pasteur. 

L’Église baptiste à Morlaix
A Morlaix, une communauté baptiste protestante existe depuis l'arrivée du premier pasteur, un missionnaire gallois, John Jenkins, en 1834.
Un premier temple est construit en 1846, au 32, rue de Paris. 
La langue galloise, proche du breton, qui permet de traduire la Bible, explique l'arrivée de missionnaires dans les campagnes bretonnes où la religion catholique domine. John Jenkins est le premier pasteur de Morlaix, de 1834 à 1872.
Le temple de Morlaix était le plus ancien lieu de culte de la Fédération des églises évangéliques baptistes de France. Ce premier temple a aujourd'hui disparu. Il a été remplacé, au même endroit, par l'actuel au 32 rue de Paris, inauguré en 1923 et construit entre 1922 et 1924.  
Même s'il n'y a jamais eu de grande communauté, celle-ci se composant seulement de quelques dizaines de membres, une présence baptiste s'est toujours maintenue.
Dans la vie locale, les baptistes sont présents au niveau social, notamment au début du XXe siècle où l'église s'occupe d'écoles et d'hospices. Elle est présente au Diben (à Plougasnou) mais aussi à Lannéanou, à Huelgoat ou encore à Trémel, dans les Côtes-d'Armor. 
Temple baptiste de Morlaix, 32 rue de Paris 2016. Image Google street

André Féat, pasteur assistant à Morlaix dans les années 40, fait partie d'une longue lignée de pasteurs. Beaucoup se sont succédé sans rester très longtemps à Morlaix, peut-être à l'exception d'Alfred Somerville (1925-1955), d'Henri Razzano (1975-1984), de José Loncke (1984-1996) et d'André Letzel (2002-2008). Il faut aussi noter l'apport de Robert Somerville, ancien pasteur et figure nationale du protestantisme national, qui a toujours été proche de l'église de Morlaix et attentif à son développement.
Enfin, l’Écossaise Alison Wyld est devenue officiellement la première pasteure de l'Eglise baptiste de Morlaix le 14 février 2021.
 
Le pasteur Gerson Tomaz et son épouse, Sonia (au centre), Le Télégramme. Morlaix 10 septembre 2016.

Une famille engagée politiquement
André Féat naît à Morlaix le 20 octobre 1916, dans un contexte compliqué car la maman, Marie Simon, est célibataire et n'a que seize ans. L'enfant, André Marie Simon, est reconnu par sa mère le 13 novembre 1916 et plus tard, par le père avec le mariage des époux Pierre Féat et Marie Simon le 20 janvier 1919 à Morlaix. Pierre est alors mobilisé au 19e Régiment d'Infanterie.
 
En 1936, la famille Féat, dont tous les membres sont originaires de Morlaix, habite Rampe Saint-Nicolas. On a Pierre, le père, né en 1898, menuisier dans la Compagnie d'ameublement de Morlaix ; Jeanne, mère au foyer, née en 1900 ; André, fils, né en 1916, typographe ; Pierre, fils, né en 1924 ; Marguerite, née en 1927 ; François, né en 1932.  
 

Famille Féat Morlaix recensement 1936, vue 10 sur 199. Archives du Finistère. Attention aux erreurs Marguerite n'est pas de 1927 mais de 1922.

Le 14 novembre 1938 à Morlaix, André Féat se marie avec Germaine Eve, employée de commerce (Annonce dans La Dépêche de Brest du 15 novembre 1938). Le couple habite alors 22 Place des Halles à Morlaix.
 
La famille n'a pas de racines protestantes mais les parents sont engagés politiquement.
Le père, ouvrier adhérent au Parti Communiste, est fait prisonnier en 1940 pour suspicion d’appartenance au Parti. Il est arrêté et emprisonné cinq mois à la prison de Rennes.  
Dans un entretien au Télégramme du 9 mars 2019, Marguerite, la fille Féat, évoque des souvenirs de cette époque et se souvient des voyages effectués par sa mère une fois par semaine pour effectuer des visites à la prison de Rennes. Pendant ce temps, Marguerite s’occupe de ses frères cadets, dont le petit dernier, Yvan, né le 16 mai 1938. « Un prénom à la russe, refusé par l’Église », explique-t-elle. Hippolyte et André sont inscrits sur son acte de baptême. André, comme son frère aîné, est alors élève pasteur.
 
Un pasteur dans la Résistance
Dans les années trente, André Féat adhère à la S.F.I.O, dans le groupe des jeunesses socialistes de Morlaix. En 1939, il devient le trésorier fédéral des Jeunesses Socialistes du Finistère. Lors des campagnes électorales, il épaule Tanguy-Prigent, un socialiste qui deviendra ministre de l’Agriculture du Général de Gaulle après guerre.
Parallèlement, André exerce comme pasteur assistant à Morlaix, il habite toujours au numéro 22 de la Place des Halles. Son engagement politique le conduit également à adhérer au Parti Socialiste clandestin.
Il participe à la Résistance au sein du mouvement Libération-Nord et du Réseau Henri Vincent de protection des juifs (d'après sa soeur il a recueilli des juifs pour les soustraire à la barbarie). Il est spécialement chargé de la diffusion de journaux clandestins dans la région de Morlaix.
En tant que pasteur, au Temple de Morlaix (situé en face la Kommandantur), il va marier  sa sœur Marguerite et Jean Hameury son beau-frère, recherché par les Allemands comme réfractaire au Service du Travail Obligatoire. 
Sa soeur raconte : « Mon frère Dédé nous a mariés au Temple, situé face à la Kommandantur, en pleine Occupation alors que Jean, mon fiancé, était recherché car réfractaire au S.T.O ». L’inconscience de la jeunesse ou l’envie de défier l’ennemi ? « Un peu des deux probablement », analyse la vieille dame, dont le regard se perd dans les tréfonds de sa mémoire.

Otage 
Le 26 décembre 1943, André Féat fait partie d'une liste de 60 otages arrêtés  à Morlaix après un attentat contre les Allemands dans la commune (son beau-frère, Georges Le Roy, mari de sa sœur Josée est également arrêté)
 
La déportation
André Féat passe par la prison de Rennes et par  le camp de Compiègne avant d'arriver à Buchenwald le 24 janvier 1944 (numéro de matricule  42 907).
Fiche du pasteur André Féat à Flossenbürg. Source Arolsen     
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André Féat est transféré au camp de concentration Flossenbürg, en Bavière, le 24 février 1944 ( numéro de matricule 6941). 
Le travail dans le camp de Flossenbürg tourne autour de deux grands axes : l’industrie d’armement, en particulier dans l’aéronautique avec des usines Messerschmitt (c'est dans ce kommando que décèdera son beau-frère), et les travaux usants dans les carrières de granit, le forage de tunnels et d’usines souterraines.
Le 26 janvier 1945, André Féat fait partie d'un convoi de 750 détenus transférés à Kamenz (kommando de Gross-Rosen) où ils arrivent le 28 janvier. Enfin, il est transféré à Dachau le 16 mars, dans un convoi de 200 détenus dans le cadre d’une évacuation du camp de Gross-Rosen.
Il meurt le 3 avril 1945 à Dachau en Allemagne, dans ce qu'on a appelé "la baraque des prêtres" où 2720 prêtres et pasteurs ont été déportés entre 1938 et 1945 : 1034 d'entre eux y laisseront la vie parmi lesquels André Féat.
 
La famille apprend la triste nouvelle des semaines plus tard par un courrier transmis à son épouse. Un simple avis de décès des Jeunesses socialistes l’annonce publiquement. 
Le pasteur Alfred Somerville (1899-1975) sera très affecté de la mort d'André Féat qui était en formation au moment de son arrestation. Il aurait pu seconder le pasteur Somerville dans de nombreuses taches. Joseph Plassard (1919-1944), un autre membre de la communauté protestante, a lui aussi été otage à Morlaix, déporté et n'est pas revenu des camps.
 
Le nom d'André Féat figure sur un monument commémoratif à Morlaix.
 

Le saviez-vous ?
Le pasteur Henri Whelpton, de l'Eglise méthodiste de Lannion est venu plusieurs fois au Temple baptiste de Morlaix pour y donner des conférences. La presse des années 20 et 30 en conserve deux traces. La première se situe le 19 novembre 1925 (annonce dans Ouest-Eclair).
Conférence du pasteur Whelpton. 19 novembre 1925

La deuxième conférence va se dérouler le 2 mars 1933, Henri Whelpton évoque une page de l'histoire d'Angleterre : "L'homme qui sauva son pays, le destin de John Wesley."
 

 
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Si vous avez des remarques ou des documents à apporter pour compléter cet article, merci d'utiliser le formulaire de contact, en laissant votre adresse mail pour que je puisse vous répondre.
 
Sources 
Etat civil de Morlaix, archives départementales du Finistère :
20 octobre 1916, registre des naissances, André Simon, reconnu et devenu André Féat ; 1919, mariage Pierre Féat et Jeanne Simon ; 14 mars 1922, naissance Marguerite Féat ; 1936, recensement Morlaix.
 
La Dépêche de Brest, 14 novembre 1938, annonce de mariage André Féat et Germaine Eve.
 
Documents des camps de Flossenbürg et Dachau (Base Arolsen, cliquer ici)
 
Article du Télégramme, dans l'édition du 26 avril 2019, consacré aux souvenirs de Marguerite Hameury, soeur du pasteur André Féat, cliquer ici
 
Article du Télégramme du 10 septembre 2016 sur l'histoire du Temple baptiste de Morlaix, cliquer ici
 
Fiche de l'association Flossenbürg, cliquer ici 
 
Article très complet sur les déportés de Morlaix dans les camps nazis Le chiffon rouge, P.C.F Morlaix, cliquer ici
 
150 ans de protestantisme dans la région de Morlaix, document de l'Eglise baptiste de Morlaix, cliquer ici 
 
Blog de l'histoire de l'Eglise protestante unie des Côtes d'Armor, article sur Henri Whelpton, cliquer ici
 
 
Famille Féat  
(Des recherches sont encore en cours)
 
Le père, Pierre Marie Féat, né le 7 juin 1898, rue de la gare à Morlaix, menuisier, médaille d'argent du travail (publication le 16 juillet 1957 dans Ouest-France), décédé le 11 novembre 1960 à Morlaix, retraité des tabacs, 10 rampe Saint-Nicolas (fiche Généanet ici).
La mère, Marie Féat, née Simon, née le 18 avril 1900 à Morlaix. Mariage le 20 janvier 1919 à Morlaix, décédée le 8 mars 1969 à Morlaix. 
Le couple Pierre et Marie Féat aura 5 enfants :
André, 20 octobre 1916, marié avec Germaine Eve, ouvrier typographe puis pasteur, décédé le 3 avril 1945. 
Marguerite, née le 14 mars 1922, mariée avec Jean Hameury le 18 septembre 1943 à Morlaix. Le couple aura un fils, Serge. Marguerite est décédée en juillet 2022. 
Pierre, né en 1924. 
François, né en 1932.
Hippolyte, André (appelé Yvan) né en 1938. 
 
Marguerite Féat fait aussi état dans un article du Télégramme de Josée qui serait sa soeur aînée, mariée avec Georges Le Roy (déporté). Georges Le Roy décède à 24 ans le 21 juillet 1944 dans le Kommando du camp de Flossenbürg.
Autre point à éclaircir : André Féat aurait été nommé pasteur à Ploufragan en 1944 (alors qu'il est arrêté en 1943!), une information à vérifier...
 
Marguerite Hameury, née Féat photographiée dans l'édition du 9 mars 2019 au sujet du droit de vote des femmes en 1945. A droite sa photo quand elle avait 20 ans.

 
Documents sur la déportation. 
1944-1945

Fiche du pasteur André Féat à Flossenbürg. Source Arolsen     













 

 

 

 

 


 
 
 
 
Buchenwald. Fiche du pasteur André Féat à Buchenwald. Source Arolsen

 
Fiche du pasteur André Féat. Source Arolsen

Camp de Flossenburg. Fiche du pasteur André Féat à Flossenbürg. Source Arolsen

Fiche du pasteur André Féat. Source Arolsen

Camp de Dachau. Fiche du pasteur André Féat à Dachau. Source Arolsen

 
Fiche du pasteur André Féat à Flossenbürg, recto.

Fiche du pasteur André Féat à Flossenbürg, verso avec écriture manuscrite

 
André Féat, fiche à Flossenbürg, kommando Gross-Rosen 26 janvier 1945. Profession : Typographe

 
 
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