samedi 22 février 2025

L'histoire des Eglises protestantes dans les Côtes d'Armor. Sommaire

 

On pense trop hâtivement que la Bretagne est une terre exclusivement catholique, c'est une erreur.
Si l'on y regarde de plus près, l'histoire du protestantisme y est bien ancrée localement.

Ce blog, commencé en 2018, vous présente l’histoire des Églises protestantes dans les
Côtes-d'Armor (ex Côtes-du-Nord) à la fin du XIXe et au XXe siècle à travers une centaine d'articles originaux. Différents courants existaient : Évangéliques, Méthodistes, Baptistes, Réformés, Anglicans... Plusieurs se sont regroupés pour former ce qui est devenu aujourd'hui l’Église Protestante Unie de France et d'autres sont restées dans leur groupe d'origine. 

Bonne lecture !

Attention, en raison d'un projet de publication en 2025 au éditions de La Cause, plusieurs articles ne sont plus disponibles pour le moment. Ils seront remis en ligne dans le but servir de complément illustré à la publication envisagée...

 

Nouveaux articles en 2025

Jean-Claude Crespin (1937-2024), archiviste, fils du pasteur Yves Crespin, cliquer ici

Pierre Prigent (1928-2024), théologien protestant, cliquer ici

Des documents retrouvés en 2024 sur le pasteur Yves Crespin, cliquer ici

 

10 Nouveaux articles en 2024 

Mouvements de jeunesse (scouts et autres) dans l’Église protestante réformée de Saint-Brieuc. 1950-1970, cliquer ici

Vendredi 31 mai 2024, hommage à la Résistance au Hinglé et conférence où il a été question de Georges Bessis (informations ici)

Transfert d'archives protestantes au Archives départementales 22, 12 juin 2024, cliquer ici

Portrait de Danièle Vaudrey (1946-2024), ici

Portrait de Jean-Claude Nexon (1934-2024), cliquer ici 

Histoire de l'école évangélique de Trémel (22), cliquer ici

Écoles et pensionnats privés accueillants des protestants à Dinan, 1827-1890, ici    

Les constructions de Harry Stamp à Saint-Brieuc, 1926-1952, ici 

Les conférences du pasteur Théophile Roux 1908-1917, ici

Visite guidée et conférence en 2024 à Saint-Brieuc sur le thème du protestantisme, ici

 

Des protestants dans la Résistance :

Les conférences et animations depuis 2020 autour du pasteur Crespin et des autres protestants Résistants, ici

Itinéraire dans Saint-Brieuc sur les traces d'Yves Crespin,  ici

Le pasteur Crespin : présentation de l'ouvrage qui lui est consacré et de documents inédits ici


Erling Hansen, médecin et Résistant, ici

Georges Bessis, éducateur et Résistant, ajouts en mars 2023 et juin 2024, ici

Ernest Prigent, entrepreneur et Résistant, ici

Les six pasteurs Résistants, morts dans les camps de concentration (1944-1945) Ajouts en juin 2023  ici

André Féat, pasteur baptiste à Morlaix, Résistant et déporté, ici



Les biographies de pasteurs, prédicateurs laïcs et personnalités du monde protestant à Saint-Brieuc, Perros-Guirec, Lannion,  ici

 

Les protestants militaires et prisonniers civils allemands en 1914-1918 ici (non disponible)



Les protestants dans le dialogue œcuménique et entre les religions, ici (non disponible)

Les engagements des protestants dans les Côtes-du-Nord, ici (non disponible)

La place des femmes dans l’Église protestante Unie des Côtes d’Armor, ici (non disponible)

Les prédications du pasteur François Manac’h, ici (non disponible)

Les temples de Saint-Brieuc, Perros, Lannion, Etables, dans le Trégor (non disponible temporairement)

Le regard des catholiques sur les protestants dans les Côtes-du-Nord, une enquête en 1936, ici 

Madagascar dans l'histoire de la paroisse réformée de Saint-Brieuc, ici

Les protestants forains et Tziganes dans les Côtes-du-Nord, ici

 

Des portraits :

Erling Hansen (1909-2008) ici

L'album souvenir d'Erling Hansen (1999 et 2013), ici

René Tostivint (professeur d'histoire) et Roland Tostivint (céramiste et musicien), ici

Hélène Babut (professeure agrégée 1899, Étables) et Marie Gugenheim, ici (non disponible)

La famille Taffatz, protestants d'origine suisse, ici  publication en Juin 2023

Danièle Vaudrey (1946-2024), ici

Georges Minard (1922-2023), protestant à Perros, ici

La famille Quoniam-Ménégoz, protestants à Dinan et Saint-Brieuc, ici publication en juillet 2023

Louis et Marie Ricoeur (1907 à 1909) et Paul Ricoeur ici (non disponible)

Louise Weiss à Saint-Quay en 1914 ici (non disponible)

Louis Nathaniel Rossel, chef militaire de la Commune de Paris ici (non disponible)

 

L'histoire de communautés protestantes :

Les protestants à Dinan et le temple de Dinan ici

L'oeuvre de Priscilla Johnson, née Hoops, à Plouha et Coatilliau, ici

La Maison Blanche à Quévert, une oeuvre protestante de Priscilla Johnson. 1955, ici

L’Église protestante évangélique Perspective de Saint-Brieuc, ici

Les protestants évangéliques pentecôtistes à Saint-Brieuc, ici

Les protestants évangéliques pentecôtistes à Lannion, ici publication en décembre 2023

Église protestante évangélique, 38 rue du Pré-Chesnay à Saint-Brieuc, ici

Écoles et pensionnats privés accueillants des protestants à Dinan, 1827-1890, ici    publication janvier 2024

Les constructions de Harry Stamp à Saint-Brieuc, 1926-1952, ici 

Les protestants dans le quartier de Robien à Saint-Brieuc, ici

Les protestants à Pontivy 1562-2018, ici

Le manoir de Crampoisic ici (non disponible)

Les protestants à Perros-Guirec ici (non disponible)

Le temple de Perros-Guirec ici (non disponible)

Les protestants dans le Trégor ici (non disponible)

Des protestants à Saint-Quay-Portrieux ici (non disponible)

Les protestants réformés dans les Côtes-du-Nord : Les origines (1864) et 1906-1938 ici (non disponible)

Les protestants réformés dans les Côtes-du-Nord : de 1938 à nos jours ici (non disponible)

 
 

DES DOSSIERS, DES PHOTOS, DES TÉMOIGNAGES...

Ce travail est issu de l'étude historique de documents issus des archives des Temples protestants de Saint-Brieuc, de Perros-Guirec, de Lannion, des archives municipales de Saint-Brieuc, des archives départementales et nationales.

De nombreux témoignages recueillis ces dernières années viennent enrichir le contenu de ces pages.  

Ces différents aspects du monde protestants méritaient bien d'être mieux connus...

L'auteur du blog, Richard Fortat, en 2018 aux Archives nationales à St Denis.


 

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vendredi 21 février 2025

Jean-Claude Crespin (1937-2024), archiviste, fils du pasteur Résistant Yves Crespin.

Jean-Claude Crespin
 

Sans le travail mené par Jean-Claude Crespin pour perpétuer la mémoire de son père, nous ne saurions quasiment rien sur le parcours exceptionnel du pasteur Crespin. En tant qu'aîné de la fratrie, Jean-Claude a conservé quelques souvenirs de la période de l'Occupation. Mais surtout, par sa formation d'archiviste, de janvier 1970 à septembre 1976, il va mettre de l'ordre dans les papiers familiaux, en faire un dossier et le photocopier en une trentaine d'exemplaires (famille, musées de la Résistance, services d'archives...).
En ce qui me concerne, c'est le dépôt en 2008 à la bibliothèque André Malraux de Saint-Brieuc et aux Archives départementales des Côtes-d'Armor (dossier classé en 1J 138) qui va permettre d'accéder à ces sources et d'écrire, à partir de là, Le pasteur Yves Crespin, un chrétien dans la Résistance.
La rencontre avec Jean-Claude Crespin en février 2018 a été un temps d'échanges intense, avec cet homme marqué à vie par les conséquences des engagements de son père. Mais c'était aussi un vrai réconfort pour lui de sentir que des dizaines d'années après avoir constitué ce dossier, d'autres personnes allaient continuer de faire connaître le message délivré son père, le pasteur Crespin.

 "Je veille jalousement sur ta mémoire comme sur une flamme qui vacille"
 Juillet 1981, Jean-Claude Crespin, lettre à son père.


Retour sur la vie de Jean-Claude Crespin
En 1936, Yves Maurice Crespin se marie avec Jeannine Kuntz et de cette union naîtront cinq enfants. Jean-Claude va naître
le 6 avril 1937 à Nancy où son père est en poste.

Ses frères et soeurs naîtront à Saint-Brieuc : Joël (3 juin 1938), Michel (août 1939), Mireille (septembre 1940) et Françoise (3 février 1943). 

Jean-Claude avec son frère Joël dans une poussette au port du Légué.

Jean-Claude est tout à fait à droite. Photo restaurée

Jean-Claude est le seul a avoir gardé des souvenirs des moments qui ont précédé l'arrestation de son père en 1943 (voir son texte manuscrit tout à la fin de cet article).

Sur le plan professionnel, Jean-Claude Crespin occupera le poste de secrétaire de documentation aux archives départementales du Puy-de-Dôme. A ce titre, il est l'auteur d'un travail de recherches sur le protestantisme en Auvergne.

Jean-Claude Crespin à Saint-Brieuc en 1983

Sur le côté de la prison, vous avez la plaque de la rue du Pasteur Crespin. Celle que vous verrez n'est plus placée sur un poteau de béton mais fixée directement contre le mur extérieur de la prison. 

Photo de jean-Claude Crespin. 1983

Cette photo, c'est toute une histoire, elle a été prise par Jean-Claude Crespin en 1983...
Voici comment lui-même raconte l'histoire : "Les 16 et 17 juillet 1983, je suis allé à Saint-Brieuc. J'ai filmé la rue Victor Hugo, la rue Pasteur Crespin... J'ai eu quelques ennuis d'ailleurs. Deux matons sont venus me demander ce que je faisais. J'ai expliqué que j'étais le fils d'un résistant de Saint-Brieuc et qu'une rue portait le nom de mon père. Ensuite, c'est une voiture de police avec son phare tournoyant : "Monsieur, nous avons reçu un coup de téléphone du directeur de la prison nous signalant qu'un individu prenait des photos de la prison..."

Heureusement, tout est rentré dans l'ordre après le contrôle d'identité...    

La rencontre avec Jean-Claude chez lui dans le Massif-Central

Les problèmes de surdité de Jean-Claude rendaient quasiment impossibles les contacts téléphoniques et par écrit c'était souvent très long entre chaque courrier... Une rencontre était vraiment nécessaire, chez lui, à Riom, tout près de Clermont-Ferrand. L'arrivée fut assez étrange car après avoir frappé très fort à la porte plusieurs fois, personne n'avait répondu. Poussant la porte qui n'était pas fermée, et après avoir appelé avec une forte voix, toujours rien. Je me demandais s'il n'était pas arrivé quelque chose. Le tour des pièces effectué, rien encore, c'était inquiétant... Et soudainement Jean-Claude arriva dont on ne sait où ! Il gardait son manteau à l'intérieur de la maison où visiblement il n'y avait pas de chauffage, pourtant on était au mois de février... On s'installa ensuite sur la petit terrasse où il faisait meilleur et la discussion commença autour des photos... Un moment inoubliable...

Dans la cour de chez Jean-Claude, à gauche et Richard Fortat à droite 24 février 2018. Photo Sophie Bertho.


Le décès de Jean-Claude en 2024
Jean-Claude Crespin est décédé en février 2024, il avait 87 ans. Yves Crespin, petit-fils du pasteur, a organisé les obsèques de son parrain. Jean Crespin, fils de Raoul Crespin et neveu du pasteur Yves Crespin, a assisté avec sa femme à la cérémonie d'obsèques de Jean-Claude, présidée par la pasteure Leïla Baccuet. Françoise Crespin, épouse divorcée d'Yves Crespin, fils ainé de Jean-Claude a lu l'hommage remarquable et plein de sensibilité qu'elle avait rédigé.
Voici le discours d’hommage prononcé par Françoise Crespin :
« J’ai connu Jean-Claude quand j’étais jeune à l’âge de 22 ans, mais je l’ai réellement connu bien plus tard… Marqué par l’arrestation à son domicile de son père Yves Crespin, pasteur de son état… Arrestation par la Gestapo sous les yeux de son fils qui avait 6 ou 7 ans. Yves Crespin est mort ensuite en déportation au camp de Dora en Allemagne.
Jean-Claude a ensuite passé plusieurs années au Chambon-sur-Lignon avec son frère cadet, loin de sa mère.
Cette tragédie a été le fil conducteur de toute sa vie, dans le sens qu’il n’a jamais fait le deuil de ce père auréolé.
Il n’a eu de cesse de faire des recherches sur son père et il n’est pas devenu archiviste pour rien. Il a fait partie et a œuvré pour l’Association des Déportés de France.
Cette tragédie a été aussi, je pense, la raison profonde de l’échec de son mariage et surtout l’échec de bout en bout de sa relation avec ses trois fils, Yves, Laurent et Pascal, qu’il n’avait plus revu depuis 35 ans.
Il était, comme diraient les jeunes d’aujourd’hui, "décalé", et c’est sûr qu’il n’a pas su s’y prendre avec ses fils.
Et pourtant, Jean-Claude était un homme intelligent, brillant même, passionné d’histoire, ayant un avis éclairé sur tout.
Je me souviens que ses réflexions à l’emporte-pièce me faisaient souvent beaucoup rire
".

La cérémonie a eu lieu le samedi 10 février au crématorium de Crouël à Clermont-Ferrand mais des mois plus tard, en été, les cendres de Jean-Claude ont été dispersées dans la baie de Saint-Brieuc, au large d'Erquy, selon ses volontés. Jean-Claude n'était jamais parti d'ici...


Si vous avez des questions ou des éléments pour compléter cet article, merci d'utiliser le formulaire de contact en haut à droite, en laissant votre adresse mail pour la réponse... Richard Fortat

 

Retour au sommaire du blog de l'histoire des protestants dans les Côtes d'Armor , ici 

 

Pour compléter cette lecture

Article détaillé sur l'histoire du pasteur Yves Crespin, cliquer ici

Nouveaux documents sur le pasteur Yves Crespin, février 2025, cliquer ici

Circuit de découverte, sur les traces du pasteur Crespin à Saint-Brieuc, cliquer ici 

Transfert d'archives protestantes (Église Protestante Unie de France) aux Archives départementales en juin 2024, cliquer ici

Sources

Correspondances avec Jean Crespin.

Archives de la paroisse protestante réformée de Saint-Brieuc.
Correspondances et entretien avec Jean-Claude Crespin.

Document
 


jeudi 20 février 2025

André Féat (1916-1945), pasteur de l’Église Baptiste de Morlaix, Résistant et déporté.

André Féat est un pasteur de l’Église baptiste de Morlaix qui était résistant. Il a été déporté au camp de Flossenbürg et il est mort à Dachau en 1945. 

A partir de cet article, des recherches menées début 2025 par Carole Féat, la petite fille d'André Féat. Ces nouveaux éléments, en particulier sur le sauvetage de juifs, vont permettre d'enrichir notre connaissance de l'action de ce jeune pasteur. 

L’Église baptiste à Morlaix
A Morlaix, une communauté baptiste protestante existe depuis l'arrivée du premier pasteur, un missionnaire gallois, John Jenkins, en 1834.
Un premier temple est construit en 1846, au 32, rue de Paris. 
La langue galloise, proche du breton, qui permet de traduire la Bible, explique l'arrivée de missionnaires dans les campagnes bretonnes où la religion catholique domine. John Jenkins est le premier pasteur de Morlaix, de 1834 à 1872.
Le temple de Morlaix était le plus ancien lieu de culte de la Fédération des églises évangéliques baptistes de France. Ce premier temple a aujourd'hui disparu. Il a été remplacé, au même endroit, par l'actuel au 32 rue de Paris, inauguré en 1923 et construit entre 1922 et 1924.  
Même s'il n'y a jamais eu de grande communauté, celle-ci se composant seulement de quelques dizaines de membres, une présence baptiste s'est toujours maintenue.
Dans la vie locale, les baptistes sont présents au niveau social, notamment au début du XXe siècle où l'église s'occupe d'écoles et d'hospices. Elle est présente au Diben (à Plougasnou) mais aussi à Lannéanou, à Huelgoat ou encore à Trémel, dans les Côtes-d'Armor. 
Temple baptiste de Morlaix, 32 rue de Paris 2016. Image Google street

André Féat, pasteur assistant à Morlaix dans les années 40, fait partie d'une longue lignée de pasteurs. Beaucoup se sont succédé sans rester très longtemps à Morlaix, peut-être à l'exception d'Alfred Somerville (1925-1955), d'Henri Razzano (1975-1984), de José Loncke (1984-1996) et d'André Letzel (2002-2008). Il faut aussi noter l'apport de Robert Somerville, ancien pasteur et figure nationale du protestantisme national, qui a toujours été proche de l'église de Morlaix et attentif à son développement.
Enfin, l’Écossaise Alison Wyld est devenue officiellement la première pasteure de l'Eglise baptiste de Morlaix le 14 février 2021.
 
Le pasteur Gerson Tomaz et son épouse, Sonia (au centre), Le Télégramme. Morlaix 10 septembre 2016.

Une famille engagée politiquement
André Féat naît à Morlaix le 20 octobre 1916, dans un contexte compliqué car la maman, Marie Simon, est célibataire et n'a que seize ans. L'enfant, André Marie Simon, est reconnu par sa mère le 13 novembre 1916 et plus tard, par le père avec le mariage des époux Pierre Féat et Marie Simon le 20 janvier 1919 à Morlaix. Pierre est alors mobilisé au 19e Régiment d'Infanterie.
 
En 1936, la famille Féat, dont tous les membres sont originaires de Morlaix, habite Rampe Saint-Nicolas. On a Pierre, le père, né en 1898, menuisier dans la Compagnie d'ameublement de Morlaix ; Jeanne, mère au foyer, née en 1900 ; André, fils, né en 1916, typographe ; Pierre, fils, né en 1924 ; Marguerite, née en 1927 ; François, né en 1932.  
 

Famille Féat Morlaix recensement 1936, vue 10 sur 199. Archives du Finistère. Attention aux erreurs Marguerite n'est pas de 1927 mais de 1922.

Le 14 novembre 1938 à Morlaix, André Féat se marie avec Germaine Eve, employée de commerce (Annonce dans La Dépêche de Brest du 15 novembre 1938). Le couple habite alors 22 Place des Halles à Morlaix.
 
La famille n'a pas de racines protestantes mais les parents sont engagés politiquement.
Le père, ouvrier adhérent au Parti Communiste, est fait prisonnier en 1940 pour suspicion d’appartenance au Parti. Il est arrêté et emprisonné cinq mois à la prison de Rennes.  
Dans un entretien au Télégramme du 9 mars 2019, Marguerite, la fille Féat, évoque des souvenirs de cette époque et se souvient des voyages effectués par sa mère une fois par semaine pour effectuer des visites à la prison de Rennes. Pendant ce temps, Marguerite s’occupe de ses frères cadets, dont le petit dernier, Yvan, né le 16 mai 1938. « Un prénom à la russe, refusé par l’Église », explique-t-elle. Hippolyte et André sont inscrits sur son acte de baptême. André, comme son frère aîné, est alors élève pasteur.
 
Un pasteur dans la Résistance
Dans les années trente, André Féat adhère à la S.F.I.O, dans le groupe des jeunesses socialistes de Morlaix. En 1939, il devient le trésorier fédéral des Jeunesses Socialistes du Finistère. Lors des campagnes électorales, il épaule Tanguy-Prigent, un socialiste qui deviendra ministre de l’Agriculture du Général de Gaulle après guerre.
Parallèlement, André exerce comme pasteur assistant à Morlaix, il habite toujours au numéro 22 de la Place des Halles. Son engagement politique le conduit également à adhérer au Parti Socialiste clandestin.
Il participe à la Résistance au sein du mouvement Libération-Nord et du Réseau Henri Vincent de protection des juifs (d'après sa soeur il a recueilli des juifs pour les soustraire à la barbarie). Il est spécialement chargé de la diffusion de journaux clandestins dans la région de Morlaix.
En tant que pasteur, au Temple de Morlaix (situé en face la Kommandantur), il va marier  sa sœur Marguerite et Jean Hameury son beau-frère, recherché par les Allemands comme réfractaire au Service du Travail Obligatoire. 
Sa soeur raconte : « Mon frère Dédé nous a mariés au Temple, situé face à la Kommandantur, en pleine Occupation alors que Jean, mon fiancé, était recherché car réfractaire au S.T.O ». L’inconscience de la jeunesse ou l’envie de défier l’ennemi ? « Un peu des deux probablement », analyse la vieille dame, dont le regard se perd dans les tréfonds de sa mémoire.

Otage 
Le 26 décembre 1943, André Féat fait partie d'une liste de 60 otages arrêtés  à Morlaix après un attentat contre les Allemands dans la commune (son beau-frère, Georges Le Roy, mari de sa sœur Josée est également arrêté)
 
La déportation
André Féat passe par la prison de Rennes et par  le camp de Compiègne avant d'arriver à Buchenwald le 24 janvier 1944 (numéro de matricule  42 907).
Fiche du pasteur André Féat à Flossenbürg. Source Arolsen     
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André Féat est transféré au camp de concentration Flossenbürg, en Bavière, le 24 février 1944 ( numéro de matricule 6941). 
Le travail dans le camp de Flossenbürg tourne autour de deux grands axes : l’industrie d’armement, en particulier dans l’aéronautique avec des usines Messerschmitt (c'est dans ce kommando que décèdera son beau-frère), et les travaux usants dans les carrières de granit, le forage de tunnels et d’usines souterraines.
Le 26 janvier 1945, André Féat fait partie d'un convoi de 750 détenus transférés à Kamenz (kommando de Gross-Rosen) où ils arrivent le 28 janvier. Enfin, il est transféré à Dachau le 16 mars, dans un convoi de 200 détenus dans le cadre d’une évacuation du camp de Gross-Rosen.
Il meurt le 3 avril 1945 à Dachau en Allemagne, dans ce qu'on a appelé "la baraque des prêtres" où 2720 prêtres et pasteurs ont été déportés entre 1938 et 1945 : 1034 d'entre eux y laisseront la vie parmi lesquels André Féat.
 
La famille apprend la triste nouvelle des semaines plus tard par un courrier transmis à son épouse. Un simple avis de décès des Jeunesses socialistes l’annonce publiquement. 
Le pasteur Alfred Somerville (1899-1975) sera très affecté de la mort d'André Féat qui était en formation au moment de son arrestation. Il aurait pu seconder le pasteur Somerville dans de nombreuses taches. Joseph Plassard (1919-1944), un autre membre de la communauté protestante, a lui aussi été otage à Morlaix, déporté et n'est pas revenu des camps.
 
Le nom d'André Féat figure sur un monument commémoratif à Morlaix.
 

Le saviez-vous ?
Le pasteur Henri Whelpton, de l'Eglise méthodiste de Lannion est venu plusieurs fois au Temple baptiste de Morlaix pour y donner des conférences. La presse des années 20 et 30 en conserve deux traces. La première se situe le 19 novembre 1925 (annonce dans Ouest-Eclair).
Conférence du pasteur Whelpton. 19 novembre 1925

La deuxième conférence va se dérouler le 2 mars 1933, Henri Whelpton évoque une page de l'histoire d'Angleterre : "L'homme qui sauva son pays, le destin de John Wesley."
 

 
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Si vous avez des remarques ou des documents à apporter pour compléter cet article, merci d'utiliser le formulaire de contact, en laissant votre adresse mail pour que je puisse vous répondre.
 
Sources 
Etat civil de Morlaix, archives départementales du Finistère :
20 octobre 1916, registre des naissances, André Simon, reconnu et devenu André Féat ; 1919, mariage Pierre Féat et Jeanne Simon ; 14 mars 1922, naissance Marguerite Féat ; 1936, recensement Morlaix.
 
La Dépêche de Brest, 14 novembre 1938, annonce de mariage André Féat et Germaine Eve.
 
Documents des camps de Flossenbürg et Dachau (Base Arolsen, cliquer ici)
 
Article du Télégramme, dans l'édition du 26 avril 2019, consacré aux souvenirs de Marguerite Hameury, soeur du pasteur André Féat, cliquer ici
 
Article du Télégramme du 10 septembre 2016 sur l'histoire du Temple baptiste de Morlaix, cliquer ici
 
Fiche de l'association Flossenbürg, cliquer ici 
 
Article très complet sur les déportés de Morlaix dans les camps nazis Le chiffon rouge, P.C.F Morlaix, cliquer ici
 
150 ans de protestantisme dans la région de Morlaix, document de l'Eglise baptiste de Morlaix, cliquer ici 
 
Blog de l'histoire de l'Eglise protestante unie des Côtes d'Armor, article sur Henri Whelpton, cliquer ici
 
 
Famille Féat  
(Des recherches sont encore en cours)
 
Le père, Pierre Marie Féat, né le 7 juin 1898, rue de la gare à Morlaix, menuisier, médaille d'argent du travail (publication le 16 juillet 1957 dans Ouest-France), décédé le 11 novembre 1960 à Morlaix, retraité des tabacs, 10 rampe Saint-Nicolas (fiche Généanet ici).
La mère, Marie Féat, née Simon, née le 18 avril 1900 à Morlaix. Mariage le 20 janvier 1919 à Morlaix, décédée le 8 mars 1969 à Morlaix. 
Le couple Pierre et Marie Féat aura 5 enfants :
André, 20 octobre 1916, marié avec Germaine Eve, ouvrier typographe puis pasteur, décédé le 3 avril 1945. 
Marguerite, née le 14 mars 1922, mariée avec Jean Hameury le 18 septembre 1943 à Morlaix. Le couple aura un fils, Serge. Marguerite est décédée en juillet 2022. 
Pierre, né en 1924. 
François, né en 1932.
Hippolyte, André (appelé Yvan) né en 1938. 
 
Marguerite Féat fait aussi état dans un article du Télégramme de Josée qui serait sa soeur aînée, mariée avec Georges Le Roy (déporté). Georges Le Roy décède à 24 ans le 21 juillet 1944 dans le Kommando du camp de Flossenbürg.
Autre point à éclaircir : André Féat aurait été nommé pasteur à Ploufragan en 1944 (alors qu'il est arrêté en 1943!), une information à vérifier...
 
Marguerite Hameury, née Féat photographiée dans l'édition du 9 mars 2019 au sujet du droit de vote des femmes en 1945. A droite sa photo quand elle avait 20 ans.

 
Documents sur la déportation. 
1944-1945

Fiche du pasteur André Féat à Flossenbürg. Source Arolsen     













 

 

 

 

 


 
 
 
 
Buchenwald. Fiche du pasteur André Féat à Buchenwald. Source Arolsen

 
Fiche du pasteur André Féat. Source Arolsen

Camp de Flossenburg. Fiche du pasteur André Féat à Flossenbürg. Source Arolsen

Fiche du pasteur André Féat. Source Arolsen

Camp de Dachau. Fiche du pasteur André Féat à Dachau. Source Arolsen

 
Fiche du pasteur André Féat à Flossenbürg, recto.

Fiche du pasteur André Féat à Flossenbürg, verso avec écriture manuscrite

 
André Féat, fiche à Flossenbürg, kommando Gross-Rosen 26 janvier 1945. Profession : Typographe

 
 
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