samedi 23 décembre 2023

Priscilla Johnson, née Johnson (1894-1983) missionnaire protestante à Plouha puis à Coatilliau

 

Priscilla Hoops est une missionnaire protestante américaine qui a consacré sa vie aux enfants orphelins. Elle passera plusieurs décennies  au XXe siècle dans les Côtes-du-Nord, à trois endroits différents. Priscilla Hoops est née le 30 janvier 1892 à Newark dans le New Jersey aux États-Unis. Par mariage, elle deviendra Mme Johnson. 


L'oeuvre de Priscilla Johnson à Plouha.1928-1930

Avant qu'elle ne quitte les États-Unis pour s'installer France en 1927, ses amis lui adressent un message : « Élargis l'espace de ta tente ; qu'on déploie les couvertures de ta demeure. »(cité dans Ouest-France, édition du 16 juin 2017)

Arrivée en France, le premier lieu trouvé en 1928 par Priscilla Hoops, pour s'occuper d'orphelins et d'enfants défavorisés, est une location à Plouha. La maison se trouve au niveau de la plage du Palus et s'appelle la Maison des roses. En 1930, Priscilla Hoops déménage à Paris avec les enfants dont elle a la charge.

Le 19 septembre 1931, Priscilla Hoops se marie avec un protestant, Kenric Arnot Johnson (1890-1950).

En 1940, la guerre oblige le couple Johnson, et vingt-trois enfants qui leur avaient été confiés, à se réfugier en Angleterre.

La villa Les Roses en Plouha, site Jean-Yves Carluer

Hector Arnéra, missionnaire à Plouha.

Dans la même mouvance que les Johnson, dans le recensement de 1931, au Palus à Plouha, on trouve la famille d'Hector Arnéra (1890-1966), missionnaire évangélique. Après avoir servi dans l'armée italienne comme aumônier bénévole pendant la guerre 14-18, il ouvre une Église évangélique à Cannes, en 1920. Il voyage et s'installe à Plouha, autour des années 30, où son fils Alexandre Louis Virgile est né le 21 juillet 1927 (peut-être lors d'une mission en été ?). On sait que Hector Arnéra a effectué plusieurs missions dans ce secteur, parfois avec ses frères, en 1927, 1928, 1930, 1931,1932... puis en 1946 au Château de Coatelliau chez les Johnson.

Cette maison de Plouha sert de base à Hector Arnéra pour loger sa famille mais lui, de son côté, parcourt les routes de France jusque dans le sud pour continuer d'effectuer des missions.

Hector Arnéra. Recensement 1931 à Plouha.Vue 50. Archives départementales

 

L'oeuvre de Priscilla Johnson à Coatilliau en Ploubezre. 1946-1955

Les enfants de Priscilla Johnson au Château de Coatilliau, en 1952.

 

Ouest-France dans son édition du 16 juin 2017 raconte cette histoire de Priscilla Johnson à Coatilliau. On y apprend qu'en 1945, alors qu'elle est en Angleterre, le Ministère de la Santé lui demande de revenir en France pour s'occuper d'enfants déshérités.

Sous l'impulsion de Priscilla Johnson, 46 enfants sont hébergés au château de Coatilliau entre 1946 et 1955. Ce lieu se situe à Ploubezre au sud de Lannion ; à proximité de la Mission évangélique de Trémel qui héberge également des enfants. Les deux communautés entretiennent de bonnes relations.

Madame Johnson restera dix années dans le Trégor à aider de jeunes orphelins.

Ce château de Coatilliau est entouré de seize hectares de terre. Seize enfants forment le premier groupe de pensionnaires : « Le toit du château est en très mauvais état et nous pouvons compter cinquante-trois vitres brisées ou manquantes », écrit-elle.

Le Château au sud de Lannion. Carte Google

La missionnaire et son équipe se mettent au travail pour réussir à rénover le château. Bien vite, de tout le Trégor, on envoie des vêtements et diverses choses de première nécessité. Mme Johnson organise la redistribution pour ceux qui en ont encore plus besoin Des habitants du secteur envoient même leurs  enfants aux études bibliques.

« Nous l'appelions Tanté, se souvient Michèle Le Biennec, qui passait des après-midi et des nuits entières chez Priscilla Johnson. La maison était toujours ouverte, on y trouvait une réelle chaleur humaine. » 

Le missionnaire Hector Arnéra vient rejoindre les Johnson et tient des réunions d'évangélisation dans le château mais aussi dans les alentours. (D'après Les Frères larges. S Aharonian)

Et après le décès de Ken Jonhson en juin 1949, le Gallois John Morris arrive auprès de Mme Johnson en 1950 à Coatilliau et l'Américaine Louise Allen en 1954.

En 1955, le bail de location arrive à expiration et Mme Johnson doit chercher un autre lieu pour continuer sa mission auprès des enfants. Ce sera à l'autre extrémité du département des Côtes-du-Nord, à Quévert, à côté de Dinan.


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A lire aussi dans ce blog

L'histoire de Priscilla Hoops à la Maison blanche à Quévert, ici

 

Sources

Ouest-France, édition du 16 juin 2017

Blog de Jean-Yves Carluer, article sur la famille Arnéra, ici.

Les Frères larges, S Aharonian. 2016

France-Mission, Gilbert Presle-Fabio Morin, éditions Silas 2017

Généanet, Hector Arnéra ici

Généanet, Alexandre Arnéra né à Plouha en 1927, ici 

Inventaire du Patrimoine Culturel en Bretagne, notice sur le château de Coatilliau, ici

 

vendredi 22 décembre 2023

La Maison Blanche à Quévert (22), une oeuvre protestante de Priscilla Johnson, née Hoops. 1955

 

Priscilla Johnson en 1981

La vie de Priscilla Johnson mérite d'être mieux connue. Avant de venir à Quévert en 1955, Priscilla Johnson s'était déjà occupée d'une institution pour les enfants à Plouha avant 1930 puis d'une autre à Coatalliau, à côté de Ploubezre après 1945 (voir cette histoire en cliquant ici).

Depuis 1955, au 26 rue Sainte-Anne, le centre protestant de Quévert, appelé La Maison blanche se trouve dans un ancien bâtiment, racheté par l'Américaine Priscilla Johnson, pour un prix de sept millions deux cent cinquante mille francs, payé en trois fois. Le financement est assuré par des dons d'institutions de familles protestantes anglo-saxonnes. La maison située sur un terrain de 4,5 hectares se révèle vite insuffisante pour loger les enfants et le personnel d'encadrement. Pour créer un dortoir et un réfectoire, deux autres bâtiments annexes sont aménagés. Dans un de ces bâtiments, "150 personnes viennent écouter P. John Morris prêcher à l’occasion de Noël en 1957". (Les Frères larges. S Aharonian. 2016). John Morris restera jusqu'en 1963 avant de partir quatre ans mais pour revenir de 1967 à 1967 à la tête de l'institution.

La Maison blanche en Quévert. Photo du site Centres de vacances chrétiens.

La structure est gérée par un financement propre basé sur des dons et le bénévolat fait le reste. Les valeurs chrétiennes sont à la base du projet éducatif.

La mission de Mme Johnson est celle d'établir les bases d'un orphelinat protestant pouvant accueillir une quarantaine d'enfants. "En 1956, l'établissement est agréé comme Maison à caractère social et pouvant recevoir des pupilles de l’État."(Les Frères larges. S Aharonian", page 462)


L'association loi 1901, appelée La Maison blanche-Parole de vie, est déclarée officiellement à la sous-préfecture de Dinan le 28 mars 1960 et la parution est effective le 3 juillet 1960. Son objet est le suivant : "Organiser des camps agréés par jeunesse et sport ; rencontres pour les jeunes adolescents ; les couples et leurs familles qui désirent connaitre partager la foi chrétienne ; recevoir des groupes familles ou personnes individuelles qui désirent passer un temps de repos de détente ou de recherche spirituelle ; organiser des séminaires conférences rencontres sportives formations destinées aux membres de l'association ; apporter assistance aux églises locales pour les aider dans la mise en place et le suivi des groupes de jeunes et la formation biblique de leurs adhérents ; aider les jeunes désemparés décidés à changer de vie et apporter une aide aux nécessiteux migrants et personnes dans le besoin ; proposer des animations et des services ponctuels journées familles aides diverses personnes en contact direct ou indirect avec l'association ; ainsi rendre un témoignage du salut en Jésus Christ".

Dès le début des années 60, des activités de plein air vont être proposées aux enfants par des personnes comme Monique et Dimitri Kalioudjoglou


Dans un texte écrit en 2017 par Monique Kalioudjoglou, nous nous transportons aux premières heures d’un travail commencé cinquante ans auparavant par Monique et son mari Dimitri, en lien avec la Maison blanche de Mme Johnson à Quévert :

« …C’est en 1962, lors de notre première année à la maison des enfants à Dinan, qu’un camp de jeunes avait été organisé à Saint-Jacut-de-la-Mer dans la maison annexe de la maison de Dinan dirigée par Mme Johnson assistée de Mr John Morris. Dans ce camp, beaucoup de jeunes avaient été bénis et fortifiés dans leur foi. Par la suite, sur la demande des jeunes des églises de St Brieuc, Dinard, et Dinan, nous avons pu organiser des week-end, et pendant deux ans refaire un camp d’été. Malheureusement, faute de locaux disponibles, nous avons dû arrêter ces camps. Les jeunes étaient déçus et se sentaient abandonnés, et l’équipe de la Maison Blanche de Dinan très frustrée. Cela nous a poussés à prier pour trouver une solution ». (extrait de "Du souffle dans tes voiles, infos 2017. Bulletin d’information du CDJ. 250 rue du Pont, 35800 St-Lunaire")

A noter qu'un autre centre de vacances sera ouvert à Saint-Quay-Perros.

En février 1965, Mme Johnson perd un collaborateur de la première heure en 1930, Lucien Dujon, décédé à l'âge de 90 ans à la Maison blanche et inhumé à Quévert le mardi 23 février. Lucien Dujon était une sorte de grand-père de substitution pour les enfants de l'orphelinat. Il avait exercé "comme secrétaire pour les missions baptistes du Tabernacle jusqu'en 1923". (page 460 Les Frères larges. S Aharonian)

Dans les collaborateurs on peut aussi citer le pasteur John Morris (jusqu'en 1969), Mlle Bodiou, Ivy Fisher (qui épousera Jean Paar)...

Le 28 septembre 1969, Priscilla Johnson fait construire la chapelle, à côté de la maison. Elle est appelée La Chapelle blanche et elle est inaugurée en présence du prédicateur évangélique suisse Gaston Racine.

Chapelle protestante de La Maison blanche. Quévert. Photo Richard Fortat 2023


Les enfants devant la Maison blanche en 1963. Photo Ouest-France 13 juillet 2000

 

Les années 70 et 80

En 1972 et 1973, M et Mme De Lepper dirigent La Maison blanche où on trouve une trentaine d'enfants de 6 à 16 ans. En 1974, Brenda et Gérald Sanchez remplace le couple de Lepper, ils resteront jusqu'en 1978 où le pensionnat ferme.

La Maison blanche reste discrète dans la presse locale dans les années 60, mais dans les années 70 la communauté s'ouvre de plus en plus au public. Par exemple dans l'édition de Ouest-France du 16 mars 1972, on trouve l'annonce d'une exposition organisée par La Maison blanche sur la Bible, dans la salle Beaumanoir à Dinan, .


Le 16 avril 1977, un groupe d'étudiants en théologie de l'Université biblique du Dorsetshire, séjournant à la Maison blanche, propose un programme de Gospel entrecoupé par des partages d'expériences de foi. Les jeunes se produisent à l'antenne du Centre social, pavillon Velléda dans la Cité Lécuyer avant d'aller la semaine suivante dans une salle de l'école des Cordeliers.

Toujours en 1977, au mois de novembre, une séance publique de cinéma est organisée à la Maison blanche avec un film sur les lépreux.

Le 21 avril 1978, le film "L'homme de Galilée" est projeté à l'hôtel de ville de Dinan. Ce film est présenté par la communauté évangélique et la Maison blanche. Le 26 mai 1978, c'est un autre film qui est proposé : L'enfant de la Paix, projeté à la Bibliothèque municipale de Dinan.

Alors qu'elle était déjà en retrait depuis des années, Mme Johnson prend définitivement sa retraite en 1978 et la Maison des enfants qui est l'association de gestion va perdre son agrément.

En 1979, l’Alliance Chrétienne et Missionnaire commence à gérer la Maison blanche.

Dans les années 80, cette communauté est identifiée comme étant une Église évangélique. Jean-Yves Carluer sur son blog de l'histoire des protestants en Bretagne précise à propos de la Maison blanche : "Lieu de culte, elle sert aussi de base d’appui pour la mise en place des Églises du réseau évangélique F.E.F dans le nord de la Bretagne (Dinard, Saint-Lunaire, Dinan), en relation avec le pasteur pionnier Claude Broux". 

Après son décès le 22 mai 1983 à Quévert, selon le voeu de Mme Johnson, le site reste dédié à la jeunesse.

 

Les années 90

En 1993, la Maison blanche est obligée de fermer après un incendie qui s'est déclaré dans la cheminée.

En 1994, l'association chrétienne, implantée aux États-Unis, Words of Live, Paroles de Vie, reprend cette mission. Le travail du pasteur reste axé sur les cérémonies et la vie religieuse. Le travail de l'association est effectué en direction de la jeunesse. L'activité principale de l'association est un camp d'été, en juillet.

Le pasteur Frédéric Sourisseau arrive en 1995. Voilà comment il raconte ses débuts dans un article du Télégramme du 31 août 2017 :  « Moi et ma femme habitions dans le Sud à l'époque, se rappelle le pasteur Frédéric Sourisseau, 55 ans, qui vient d'officier le culte. Nous avons entendu qu'une association chrétienne cherchait une église vivante pour l'accompagner. Il y avait une petite communauté à notre arrivée, et aucun pasteur depuis un an et demi. Les débuts ont été difficiles ! Ce n'est pas évident de faire partir une communauté. Là, on a trouvé un bon rythme, même si on préférerait que tous les âges soient représentés. »

En 1995, la Maison blanche fête son 40e anniversaire avec une retransmission par satellite d'un discours du pasteur Billy Graham.

15 mars 1995 Ouest-France

  

Arrivé en 1999, un jeune américain nommé Christopher (ou Kristopher) Stout. Il prend la direction de l'établissement. Un gros travail l'attend car la propriété n'est plus aussi bien entretenue qu'avant. Avec des bénévoles un travail de débroussaillage est entrepris et il faudra six années pour rénover les bâtiments et mettre en conformité.


Les années 2000

La maison blanche 13 juillet 2000 Ouest-France

 

En l'an 2000, un long article de Ouest-France fait découvrir au grand public l'histoire de la Maison blanche. 

En 2003, les camps d'été sont effectués sous tente, il faudra attendre 2006 pour que les jeunes soient hébergés dans les bâtiments.

Le pasteur Frédéric Sourisseau continue de son côté d'animer la communauté évangélique. Ainsi il fait venir une chorale malgache en mai 2004, constituée autour du pasteur évangélique de Rennes, Roger Rajaobelina. Les fonds récoltés vont soutenir l'association Tsiky qui oeuvre auprès d'enfants de Madagascar.


A la Maison blanche. 18 mai 2004 Ouest-France

En avril 2007, le pasteur invite le groupe américain Wings of Morning pour un concert gospel à la Chapelle blanche.

 

Camp de jeunes 8 août 2007 Ouest-France


 

Wings of Morning à Quévert 28 avril 2007 Ouest-France

Arrivé en 1999, Kristopher (Kris) et Debora (Debbie) Stout, quittent la Maison blanche avec leurs enfants en direction des États-Unis. Sous sa direction 200 adolescents, venus de toute la France, auront participé aux camps d'été. Pendant ses dix années à Quévert, Kristopher Stout a assuré la direction nationale de l'association chrétienne Words of Live. Un autre centre d'accueil pour la jeunesse a été créé à Paris Nord dans un ancien centre d'accueil protestant. Dans les années à venir La Maison blanche souhaite s'orienter vers la location pour des rencontres familiales et associatives. Kristopher Stout va prendre de nouvelles responsabilités avec la direction internationale de l'association Words of Live. Il n'est pas prêt d'oublier Quévert : "Deux de nos trois enfants sont nés ici. Quand on a fêté mon départ, j'ai vu arriver l'équipe de foot  de Quévert en cortège. Impressionnant !". Miguel Mendoza est chargé d'assurer la relève. (Ouest-France 24 avril 2009)

Au premier rang : Natalia, Luc et Michaël Stout. 24 avril 2009 Ouest-France

 

Les fêtes de Noël représentent une occasion pour la communauté évangélique de proposer un moment festif et c'est devenu une sorte de tradition. La presse s'en fait l'écho en 2011 et 2016.

Noël à la Maison blanche de Quévert 12 décembre 2011

 

Noël à la Maison blanche de Quévert 5 décembre 2016

En 2017, la presse locale braque ses projecteurs sur "la discrète communauté" de la Maison blanche à l'occasion des 500 ans de la Réforme protestante et d'une exposition qui y est proposée. Le pasteur Sourisseau rappelle que la communauté regroupe une trentaine de membres à Dinan, une soixantaine en comptant les personnes sympathisantes. La communauté quévertoise est internationale, surtout l'été. (Le Télégramme 31 août 2017)
 

La Maison blanche 31 août 2017 Le Télégramme

 

Le pasteur Frédéric Sourisseau. Ouest-France 27 septembre 2017

Dans l'édition du journal Le Télégramme du 31 août 2017, Miguel Mendoza, le président de l'association (loi 1901) Maison Blanche-Parole de Vie, est interrogé sur l'histoire de la maison. 


Miguel Mendoza, président de l'association loi 1901 Maison Blanche Parole de vie, et Jean Lovat, administrateur du site de Quévert. Photo Le Télégramme 2017

 

Visite de la Maison blanche

Michel et Gisèle Audinet sont allés visiter la Maison blanche en 2023 et en ont rapporté deux photos intéressantes. La première représente l'histoire symbolisée du lieu et la seconde est celle de l'étonnant décor de cheminée en bois que l'on trouve dans cette maison.

Photo Michel Audinet 2023


Photo Michel Audinet 2023


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A lire aussi

Histoire de Priscilla Hoops à Plouha et Coatilliau dans le Trégor, ici

 

Sources

Articles du Télégramme et de Ouest-France

Site Généanet, ici 

Les Frères larges. S Aharonian. 2016

France-Mission, Gilbert Presle-Fabio Morin, éditions Silas 2017

Site des centres de vacances chrétiens, ici

CDJ infos 2017, texte de Monique Kalioudjoglou, ici

Blog de Jean-Yves Carluer, article sur Dimitri et Monique Kalioudjoglou, ici

Déclaration de l'association en 1960 ici

Facebook de l’Église Évangélique de Lannion, ici 

Autobiographie de Mme Hoops Johnson, Les enfants de mon coeur, IMEAF, La Bégude de Mazenc, 1983. 


 
Les enfants de mon coeur Priscilla Hoops




lundi 4 septembre 2023

Les protestants des Côtes-du-Nord vus par les catholiques. 1936-1938

 


Entre 1936 et 1938, les curés des Côtes-du-Nord ont répondu à une vaste enquête sur la vie dans leur paroisse. Quatre questions sont posées sur les protestants, elles figurent à la page 40 d’un questionnaire qui en comporte 41, c’est dire que ce n’est pas le sujet central.

 

Les quatre questions sont les suivantes :

  1. Y a-t-il des protestants dans la paroisse ?
  2. Ont-ils des lieux de culte ?
  3. Des catholiques assistent-ils aux réunions protestantes ?
  4. Des parents catholiques ont-ils laissé baptiser leurs enfants par des protestants ? Y a-t-il eu des catholiques à se marier devant le ministère protestant ?

La synthèse des réponses n’est pas sans intérêt.

 

Archives du Diocèse.  St Brieuc. Questionnaires 3F11a et 3F11b. Photo RF

 

Combien de protestants ?

Les réponses apportées sont souvent très courtes, seuls 53 curés ont renseigné au moins une rubrique concernant leur paroisse.

Malgré tout, sur plus de 400 paroisses des Côtes-du-Nord entre 1936 et 1938, ces curés qui ont répondu à l’enquête permettent d’établir un aperçu des protestants dans ce département et de leurs relations avec le monde catholique.

Du côté des chiffres, il ne faut pas chercher un total purement mathématique car il reste une marge d’erreur importante. Tout d’abord à la question  « Y a-t-il des protestants dans la paroisse ? », certains curés répondent en toute honnêteté que cela dépend souvent de ce qu’ils savent ou de ce qu’on leur a dit, comme ce curé de Plouër qui écrit : « il n’y en a pas, à ma connaissance ».   

D’autre part les protestants ne sont pas censées se déclarer au curé de la paroisse catholique, ce « recensement » dépend donc de ce qui est dit sur les uns et les autres dans les petites communes où comme on dit « tout se sait » ! Dans les plus grandes communes, l’exercice est encore plus difficile et le nombre donné est approximatif.   

Mentionnons aussi les protestants « saisonniers », c’est à dire ceux  qui ne vivent en Bretagne que l’été. Ils sont souvent mentionnés mais ne résident pas à l’année.

Les « étrangers » sont bien identifiés par les curés : Langueux, « une famille sarroise »; Pléneuf, « deux de nationalité anglaise »

Ploubalay, « une famille américaine, venue depuis un an, propriétaires de la Ville Briand »; St Jacut de la Mer, « des étrangers »; St Jouan de l’Isle, « Un ménage anglais dont les enfants sont catholiques ».


Archives du Diocèse.  St Brieuc. Questionnaires 3F11a et 3F11b. Photo RF

 

 

Où sont les protestants ?

Les zones d’influence protestante correspondent à ce que l’on connaît déjà au travers des archives de l’Eglise Réformée dans le département. Il n’y a donc pas de surprise, on retrouve surtout les protestants à Saint-Brieuc (une cinquantaine), à Paimpol (évangéliques), à Lannion, à Trémel (une cinquantaine et jusqu’à 100 à 150 personnes pour Noël), à Plougrescant (une trentaine). Ce qui est étonnant aussi est de voir les zones où les protestants  sont totalement absents : Loudéac-Uzel-Plémet-Plouguenast

Dans d’autres, on ne trouve que quelques rares individus : Broons-Merdrignac, Corlay-Mur-St Nicolas, Lanvollon-Plouagat-Pontrieux., et dans le sud du département on ne trouve aucune trace des protestants.

Les salles de prières ou les lieux de culte (temples), dans cette fin des années 30, sont bien identifiés comme à Saint-Brieuc, Le Légué, Dinan, Paimpol, Trémel, Perros-Guirec, Lannion, Perros-Guirec, Pleumeur-Bodou, Trébeurden, Trédez, Plougrescant, Plouëzec, Plouha.

Le curé de Guingamp de la paroisse Notre Dame de Bon Secours parle de la roulotte évangélique qui « fait une apparition de quelques jours dans un coin quelconque en ville mais n’a pas de succès ».

On fait quelques découvertes comme lorsque le curé de Trémuson écrit : « Quelquefois les protestants de St Brieuc se rendent à la mine ». Aucune mention dans les registres de la paroisse ne parlait de cette activité missionnaire auprès des ouvriers de cette mine de plomb argentifère qui a regroupé jusqu’à plus de 800 ouvriers dont de nombreux ouvriers étrangers souvent d’Europe de l’Est (Pologne, Tchécoslovaquie, Allemagne, Autriche…). Malgré la fermeture de la mine au début des années 30, de nombreux ouvriers sont restés vivre dans leurs petites maisons construites autour du site.

La mention concernant la salle Bonne nouvelle par le curé de la paroisse St Michel de St Brieuc est également intéressante. Cette salle ouverte par M. Stamp, un évangélique, fait bien partie du paysage protestant de l’époque.

 

Archives du Diocèse.  St Brieuc. Questionnaires 3F11a et 3F11b. Photo RF

  

Le regard des curés sur les protestants

Certains sont bienveillants ou neutres comme le curé de Robien à St Brieuc qui mentionne que quelques uns de ses paroissiens sont allés à un culte protestant « par curiosité ».

Le curé de St Jacut-de-la-Mer évoque des protestants étrangers qui « seraient plutôt très agréables au clergé pastoral ».

Le curé de Plouguenast, près de Loudéac parle de protestants qui  « sont venus nous vendre des brochures protestantes, des évangiles, surtout très bien présentés et très bon marché ».

Le curé de la paroisse St Malo de Dinan atteste que des catholiques assistent aux réunions protestantes « avec assez de bonne foi ».

A Port-Blanc, le curé parle de  « 4 familles propriétaires de villas dont deux participent à nos œuvres et sont de parfaite tenue »


D’autres n’hésitent pas à envoyer quelques piques quand ils répondent à la question : « Des catholiques assistent-ils aux réunions protestantes ? »

Le curé J. Marcadet de la paroisse St Etienne à St Brieuc note par exemple « assez peu, seulement en passant pour manifester leur mauvais esprit ».

Le curé de Plérin mentionne « quelques catholiques renégats attirés par des faveurs ».

Le curé de Pleumeur-Bodou ironise sur le fait qu’il n’y a plus de catholiques à aller voir du côté des protestants « depuis que la distribution de thé a cessé ». Il explique aussi l’échec des protestants par la remarque suivante : « avant il y avait quelques pêcheurs difficiles à endoctriner ».

A Trébeurden il n’y a, d’après le curé, que quelques catholiques « indifférents » qui assistent au culte protestant « surtout l’hiver pour être au chaud ».  Le curé de Paimpol pointe aussi l’intérêt supposé de « quelques pauvres » qui se sont rapprochés des protestants « pour bénéficier des distributions de vêtements, secours… »

Le curé de Kérity, proche de Paimpol, met en avant le fait que des catholiques ont pu être attirés temporairement mais « ils sont revenus à l’église catholique ». Le curé de Plouha,  en 1936, indique que le vicaire du pasteur de Kérity tient un culte dans  une petite maison de location mais que très peu de catholiques y assistent et s’ils le font c’est « plutôt en curieux ».

Le curé d’Illifaut raille une dame « qui s’est affiliée au protestantisme, dit-elle, et la grande raison c’est qu’elle était en difficulté avec le recteur. En tout cas c’est une protestante « non-pratiquante ».

Le curé d’Étables en 1938 ne peut que constater que « deux vieilles dames rassemblent chez elles les personnes de leur quartier » et que des catholiques participent à ces réunions « malheureusement  malgré mes avertissements ». Il semble soulagé car « actuellement ces réunions semblent avoir cessé », écrit-il.

Ouvrage sur les dangers du protestantisme. 1900. Archives du Diocèse. St Brieuc. Photo RF

 

Conclusion 

Cette photographie des protestants des Côtes-du-Nord, entre 1936 et 1939, vus par les curés catholiques,  n'est pas sans intérêt. On y retrouve un mélange de respect et de petites disputes... Mais dans l'ensemble tout y est : les lieux de culte ne sont pas omis, le nombre de protestants est assez exact. Ce qui apparait aussi c'est l'isolement de nombreux protestants, dans de vastes secteurs où ils sont parfois seuls.

Cette enquête se termine à la veille d'une période douloureuse de l'histoire de la France, un moment où tous les chrétiens qui ne veulent ni de la collaboration, ni de l'occupation, devront se serrer les coudes et travailler avec d'autres ne partageant pas leurs convictions. Devant la gravité de la situation, les lignes vont bouger...

 

Sources 

La cote des Questionnaires est 3F11a et 3F11b. Ils ne sont pas par ordre alphabétique des paroisses (mis à part les grandes villes elles correspondent en gros aux communes), mais par doyennés et pour chaque doyenné on retrouve l'ordre alphabétique des paroisses.

Archives du Diocèse.  St Brieuc. Questionnaires 3F11a et 3F11b. Photo RF

 

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Document, extrait du Questionnaire. Diocèse de St Brieuc

  1. Y a-t-il des protestants dans la paroisse ?
  2. Ont-ils des lieux de culte ?
  3. Des catholiques assistent-ils aux réunions protestantes ?
  4. Des parents catholiques ont-ils laissé baptiser leurs enfants par des protestants ? Y a-t-il eu des catholiques à se marier devant le ministère protestant ?

 

Intégralité des notes. Novembre 2019

Volume 1

St Brieuc. Paroisse St Etienne, cathédrale de St Brieuc, J. Marcadet curé

  1. quelques uns seulement
  2. 2. Pas sur la paroisse
  3. assez peu seulement en passant pour manifester leur mauvais esprit
  4. 4. Pas à ma connaissance

 

St Brieuc . Ste Anne de Robien, Saint-Brieuc. J. Marcadet curé

  1. une famille protestante
  2. 2 ; quelques uns sont allés dans cette salle par curiosité

 

St Brieuc, paroisse St Michel

  1. oui, nombre inconnu, ne dépassant pas la cinquantaine

2. Un temple et la salle de Bonne nouvelle

3. Quelques personnes du bld Pasteur

4. quelques uns pour le baptême,

 

Langueux

  1. une famille sarroise

 

Plérin

  1. 4 ou 5 familles
  2. Le Légué et St Brieuc
  3. quelques catholiques renégats attirés par des faveurs

 

Pordic

1 protestant

 

Trémuson

  1. quelquefois les protestants de St Brieuc se rendent à la mine
Quintin Boulbain, curé-doyen

1.     je n’en connais qu’un qui se dise protestant

 

 

Volume 2

Lamballe Montcontour

 

Noyal

Une protestante

 

Erquy

Oui 2

 

Pléneuf

2 de nationalité anglaise

 

 

Volume 3

Corseul

une famille, ils fréquentent notre église

 

Créhen

une famille

 

Ploubalay

une famille américaine, venue depuis un an

ce sont les propriétaires de la Ville Briand

lieu de culte : à Dinard en été

 

Lancieux

une famille se dit protestante. Je crois qu’au fond, elle n’est rien.

 

St Jacut de la Mer

Oui des étrangers et passants

Seraient plutôt très agréables au clergé pastoral

 

 

Vol 4

Dinan Saint-Sauveur  1938

Presque plus

Lieu de culte : Oui mais pas de pasteur

Au temple non, mais dans les cortèges funèbres des catholiques assistent

 

Dinan, paroisse St Malo

Des catholiques assistent aux réunions protestantes « avec assez de bonne foi »

 

Plouër 1938

Oui une protestante et on m’a signalé deux autres personnes qui ne viennent pas à l’église qui seraient, dit-on, protestantes.

Une catholique s’est mariée avec le protestant devant le ministère protestant

 

 

Vol 5 Broons

Illifaut 1937

Une dame qui s’est affiliée au protestantisme, dit-elle, et la grande raison c’est qu’elle était en difficulté avec le recteur. En tout cas c’est une protestante « non-pratiquante ».

 

St Jouan de l’Isle 1936

Un ménage anglais dont les enfants sont catholiques

 

 

Vol 6 Loudéac

Plouguenast 1938

Non mais ils sont venus nous vendre des brochures protestantes, des évangiles, surtout très bien présentés et très bon marché

 

Vol 7 Corlay

Corlay

Un je crois

 

Gouarec

Un seul

 


Vol 8 Callac

Callac 1937

Oui trois

Un mariage

 

Maël-Carhaix 1939

Un

 

 

Vol 9 Guingamp

Guingamp,  Notre Dame de Bon Secours 1937

Pas de lieu de culte mais une voiture évangélique fait une apparition de quelques jours dans un coin quelconque en ville mais n’a pas de succès

 

Tome 9 II Lanvollon

Le Merzer 38

Un

 


Tome 10 Volume 1 Lannion

Lannion 1938

Deux familles un temple

 

Ploubezre  1938

Un

 

Servel  1938

Un

 

Perros-Guirec 1938

oui

Lieu de culte oui

Pas beaucoup, quelques uns seulement

 

 

Pleumeur-Bodou 1938

Pas de protestant mais il y a une maison louée par un pasteur ambulant

Q3. Pas depuis que la distribution de thé a cessé, et avant il y avait quelques pêcheurs difficiles à endoctriner

 

Saint Quay-Perros 1938

A proprement parler non mais quatre personnes fréquentent les protestants de Perros

 

Trébeurden 1938

Tois ou quatre

Lieu de culte oui

Quelques catholiques indifférents y assistent surtout l’hiver pour être au chaud , à la lumière ensemble.

Il y a eu un faux mariage (divorcés)

Deux catholiques ont épousés deux filles protestantes


 

Tome X Vol II

Trédez 1938

Pas de protestant mais un lieu de culte, une baraque

Très peu assistent

 

Trémel 1938

Oui de 40 à 45

Culte le dimanche à 10h

Oui une quinzaine, la nuit de noël de 100 à 150 personnes, presque tous les enfants

Une cinquantaine à la messe vient après

 

Plounérin 1937

4 ou 5

par curiosité peut être

 

Coatrévez 1938

un

 

Penvénan  1938

un

 

Port blanc  1938

aucun chez les hivernants. Chez les touristes, 4 familles propriétaires de villas mais dont deux participent à nos œuvres et sont de parfaite tenue

 

Plougrescant  1938

oui une trentaine

temple

catholiques assistent

mariages oui

 

 

 

vol XI  Paimpol

Paimpol  1936

oui, trois familles (six à sept personnes)

lieu de culte à Kérity

très rarement, quelques pauvres pour bénéficier des distributions de vêtements, secours…

 

Bréhat 36

oui, un israélite

 

Kerfot 36

une femme

 

Kérity 36

3 pasteurs et une quarantaine de personnes

oui un temple récemment construit

oui mais qui sont revenus à l’église catholique

 

Ploubazlanec 36

deux

 

Plouëzec 36

3 ou 4

culte à St Rion rivoi bioi ??? le samedi, très peu suivi

 

Plounez 36

oui Trois

 

 

Etables 38

oui trois

deux vieilles dames rassemblent chez elles les personnes de leur quartier

« oui malheureusement malgré mes avertissements, actuellement ces réunions semblent avoir cessé »

 

 

Saint-Quay Portrieux

rien !

 

Binic 38

une famille

 

Tréveneuc 38

un

 

Lézardrieuc 36

une famille

 

 

Plouha  36

oui, le vicaire du pasteur de Kérity

lieu de culte, une petite maison de location

très peu, plutôt en curieux

 

         Relevé effectué par Richard Fortat en novembre 2019

Archives du Diocèse.  St Brieuc. Questionnaires 3F11a et 3F11b. Photo RF

 

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