mercredi 3 décembre 2025

L'histoire des Eglises protestantes dans les Côtes d'Armor. Sommaire

On pense trop hâtivement que la Bretagne est une terre exclusivement catholique, c'est une erreur.
Si l'on y regarde de plus près, l'histoire du protestantisme y est bien ancrée localement.
Ce blog, commencé en 2018, vous présente l’histoire des Églises protestantes dans les
Côtes-d'Armor (ex Côtes-du-Nord) à la fin du XIXe et au XXe siècle à travers une centaine d'articles originaux qui couvrent les activités des mouvements évangéliques, méthodistes, baptistes, réformés, anglicans... Plusieurs se sont regroupés pour former ce qui est devenu aujourd'hui l’Église Protestante Unie de France et d'autres sont restées dans leur groupe d'origine. 

Bonne lecture !

Attention, en raison d'un projet de publication, plusieurs articles ne sont plus disponibles pour le moment. Ils seront remis en ligne dans le but servir de complément illustré à la publication envisagée...

 

7 Nouveaux articles en 2025 (ou articles complétés)

Eugène Coquard (1920-1953) soldat mort en Indochine, ici

Circuit de découverte de personnages de la Résistance (Hansen, Crespin, abbé Fleury), 26 mai 2025, ici

Jean-Claude Crespin (1937-2024), archiviste, fils du pasteur Yves Crespin, cliquer ici

Pierre Prigent (1928-2024), théologien protestant, cliquer ici

Ernest Prigent (1898-1980), Résistant, entrepreneur, cliquer ici

Des documents retrouvés en 2024 sur le pasteur Yves Crespin, cliquer ici

Solveig Hansen, doyenne des Costarmoricains, ici 

 

10 Nouveaux articles en 2024 

Mouvements de jeunesse (scouts et autres) dans l’Église protestante réformée de Saint-Brieuc. 1950-1970, cliquer ici

Vendredi 31 mai 2024, hommage à la Résistance au Hinglé et conférence où il a été question de Georges Bessis (informations ici)

Transfert d'archives protestantes au Archives départementales 22, 12 juin 2024, cliquer ici

Portrait de Danièle Vaudrey (1946-2024), ici

Portrait de Jean-Claude Nexon (1934-2024), cliquer ici 

Histoire de l'école évangélique de Trémel (22), cliquer ici

Écoles et pensionnats privés accueillants des protestants à Dinan, 1827-1890, ici    

Les constructions de Harry Stamp à Saint-Brieuc, 1926-1952, ici 

Les conférences du pasteur Théophile Roux 1908-1917, ici

Visite guidée et conférence en 2024 à Saint-Brieuc sur le thème du protestantisme, ici

 

Des protestants dans la Résistance :

Les conférences et animations depuis 2020 autour du pasteur Crespin et des autres protestants Résistants, ici

Itinéraire dans Saint-Brieuc sur les traces d'Yves Crespin,  ici

Le pasteur Crespin : présentation de l'ouvrage qui lui est consacré et de documents inédits ici


Erling Hansen, médecin et Résistant, ici

Georges Bessis, éducateur et Résistant, ajouts en mars 2023 et juin 2024, ici

Ernest Prigent, entrepreneur et Résistant, ici

Les six pasteurs Résistants, morts dans les camps de concentration (1944-1945) Ajouts en juin 2023  ici

André Féat, pasteur baptiste à Morlaix, Résistant et déporté, ici



Les biographies de pasteurs, prédicateurs laïcs et personnalités du monde protestant à Saint-Brieuc, Perros-Guirec, Lannion,  ici

Les protestants militaires et prisonniers civils allemands en 1914-1918 ici (non disponible)


Les protestants dans le dialogue œcuménique et entre les religions, ici (non disponible)

Les engagements des protestants dans les Côtes-du-Nord, ici (non disponible)

La place des femmes dans l’Église protestante Unie des Côtes d’Armor, ici (non disponible)

Les prédications du pasteur François Manac’h, ici (non disponible)

Les temples de Saint-Brieuc, Perros, Lannion, Etables, dans le Trégor (non disponible temporairement)

Le regard des catholiques sur les protestants dans les Côtes-du-Nord, une enquête en 1936, ici 

Madagascar dans l'histoire de la paroisse réformée de Saint-Brieuc, ici

Les protestants forains et Tziganes dans les Côtes-du-Nord, ici

 

Des portraits :

Erling Hansen (1909-2008) ici

L'album souvenir d'Erling Hansen (1999 et 2013), ici

René Tostivint (professeur d'histoire) et Roland Tostivint (céramiste et musicien), ici

Hélène Babut (professeure agrégée 1899, Étables) et Marie Gugenheim, ici (non disponible)

La famille Taffatz, protestants d'origine suisse, ici  publication en Juin 2023

Danièle Vaudrey (1946-2024), ici

Georges Minard (1922-2023), protestant à Perros, ici

La famille Quoniam-Ménégoz, protestants à Dinan et Saint-Brieuc, ici publication en juillet 2023

Louis et Marie Ricoeur (1907 à 1909) et Paul Ricoeur ici (non disponible)

Louise Weiss à Saint-Quay en 1914 ici (non disponible)

Louis Nathaniel Rossel, chef militaire de la Commune de Paris ici (non disponible)

 

L'histoire de communautés protestantes :

Les protestants à Dinan et le temple de Dinan ici

L'oeuvre de Priscilla Johnson, née Hoops, à Plouha et Coatilliau, ici

La Maison Blanche à Quévert, une oeuvre protestante de Priscilla Johnson. 1955, ici

L’Église protestante évangélique Perspective de Saint-Brieuc, ici

Les protestants évangéliques pentecôtistes à Saint-Brieuc, ici

Les protestants évangéliques pentecôtistes à Lannion, ici

Église protestante évangélique, 38 rue du Pré-Chesnay à Saint-Brieuc, ici

Écoles et pensionnats privés accueillants des protestants à Dinan, 1827-1890, ici    publication janvier 2024

Les constructions de Harry Stamp à Saint-Brieuc, 1926-1952, ici 

Les protestants dans le quartier de Robien à Saint-Brieuc, ici

Les protestants à Pontivy 1562-2018, ici

Le manoir de Crampoisic ici (non disponible)

Les protestants à Perros-Guirec ici (non disponible)

Le temple de Perros-Guirec ici (non disponible)

Les protestants dans le Trégor ici (non disponible)

Des protestants à Saint-Quay-Portrieux ici (non disponible)

Les protestants réformés dans les Côtes-du-Nord : Les origines (1864) et 1906-1938 ici (non disponible)

Les protestants réformés dans les Côtes-du-Nord : de 1938 à nos jours ici (non disponible)

 
 

DES DOSSIERS, DES PHOTOS, DES TÉMOIGNAGES...

Ce travail est issu de l'étude historique de documents issus des archives des Temples protestants de Saint-Brieuc, de Perros-Guirec, de Lannion, des archives municipales de Saint-Brieuc, des archives départementales et nationales, du Musée du Protestantisme à Paris. De nombreux témoignages recueillis ces dernières années viennent également enrichir le contenu de ces pages.  

Ces différents aspects du monde protestants méritaient bien d'être mieux connus...

L'auteur du blog, Richard Fortat, en 2018 aux Archives nationales à St Denis.


 

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lundi 1 décembre 2025

Eugène Coquard (1920-1953), militaire tué en Indochine, protestant.

Depuis sa création, le Temple réformé de Saint-Brieuc accueille régulièrement des familles endeuillées pour des cérémonies religieuses. Mais celle qui s'est déroulée en la mémoire d'Eugène Coquard en 1954 a dû être particulièrement douloureuse pour les proches.

Un soldat en Indochine

Eugène Coquard est né le 23 juillet 1920 au Havre en Seine-Maritime mais plus tard la famille habite à Cesson, près de Saint-Brieuc. Il épouse Fernande Catros de Saint-Brieuc. 

Pendant la guerre 39-45 il est réquisitionné pour le Service du Travail Obligatoire (STO) puis rentre dans le maquis.  

Pendant la Guerre d'Indochine, le sergent-chef Eugène Coquard faisait partie du Centre d'instruction des troupes aéroportées en Indochine (C.I.T.A.I). Il sera tué au combat , dans le Tonkin, le 24 janvier 1953 et un service funèbre est célébré au temple protestant. Son corps ne sera rapatrié en France qu'en 1954 où se déroulera une cérémonie religieuse  le jeudi 9 septembre.

21 février 1953 Ouest-France

Le journal Ouest-France a publié un article assez complet à l'occasion de cette cérémonie le 7 septembre 1954. Le lieutenant Godard a prononcé un discours dans lequel il a retracé l'engagement d'Eugène Coquard dans son unité.

 

Si vous avez des commentaires ou des renseignements sur ce sujet, merci d'utiliser le formulaire de contact en haut de page en laissant votre adresse mail pour que je puisse vous répondre...

Retour au sommaire de l'histoire des protestants des Côtes d'Armor, ici     

Sources

Ouest-France 21 février 1953, 7 septembre 1954

Généanet, fiche mémoire des Hommes, cliquer ici 

Mémorialwebgen, cliquer ici

Ernest Prigent (1898-1980), entrepreneur, conseiller municipal, protestant et Résistant

Ernest Prigent est né le 14 avril 1898 à Plouégat-Moysan dans le Finistère. Dans la vie publique, il a été connu dans le secteur de Saint-Brieuc comme entrepreneur, conseiller municipal, protestant et Résistant.

Ernest Prigent (1898-1980)

La conversion au protestantisme
Ernest Prigent se marie le 19 juin 1922 à Trémel avec Hélène Somerville (1897-1984), née à Trémel, fille du pasteur Georges Somerville. Un des frères d'Hélène deviendra lui-même pasteur à Morlaix. 
Pour Ernest, le protestantisme n'est pas familial, il va se convertir. Ernest et Hélène Prigent vont d'abord habiter Morlaix, puis en 40-41, après la démobilisation, la famille s'installe à Saint-Brieuc au 32 Boulevard de la Tour d’Auvergne. Le couple est inscrit dans le registre des membres de l’Église protestante à partir de 1942. Plus tard, ils résident à Ker-Couantic, rue Duguay Trouin, dans une sorte de petit château au pied d'immeubles construits par Ernest Prigent. 
Ernest et Hélène Prigent vont être actifs au sein de la communauté protestante dirigée dans les années de guerre par le pasteur Yves Crespin. Ernest Prigent occupera la fonction de secrétaire du conseil presbytéral de 1946 à 1948.
 
Ernest Prigent 1948. Archives du temple de Saint-Brieuc. Photo RF

Les années 40, l'arrestation en 1943
Ernest Prigent est de cette génération qui aura été engagée dans deux guerres. Pendant la Première guerre mondiale, il est incorporé au 10e Régiment d’artillerie le 3 mai 1917 avant de passer au 301e régiment d’artillerie lourde le 14 avril 1918. Maréchal des logis le 19 juin 1918, il est démobilisé le 24 octobre 1919. Pendant la Seconde guerre mondiale, il est rappelé sous les drapeaux le 7 septembre 1939 puis affecté à la Manufacture nationale d’armes de Tulle jusqu’au 14 janvier 1940.
A Saint-Brieuc, il s'engage auprès de ses amis protestants pour donner des coups de main. Par exemple, il participé activement à la désertion d'un soldat alsacien qui s'était présenté au Temple. Ayant habité Strasbourg, c'est lui qui interroge ce soldat pour s'assurer que c'est une personne fiable. En 1943, Ernest Prigent est arrêté avec le pasteur Crespin, le docteur Hansen et d'autres protestants comme Jean Huck dont il est l'employeur. Ernest Prigent est incarcéré à Saint-Brieuc, transféré à la prison de Rennes où il reste pendant six semaines, puis il est libéré.
 
Ernest Prigent, dans la Résistance. 
Une fois libéré, Ernest Prigent, ne rentre pas dans le rang. Son fils, Pierre, se souvient d'une vie qui laissait une bonne place pour des actions clandestines :  "Nous sommes arrivés à Saint-Brieuc avec mes parents au début de la guerre. Mon père était entrepreneur dans le bâtiment et il s'absentait beaucoup de la maison. 
Il passait deux à trois jours par semaine dans le secteur de Loudéac où il était en contact avec la Résistance dont de nombreux membres se cachaient dans la forêt. J'y suis allé une fois en vélo, avec mon père. Sur nos porte-bagages on remportait des cartons avec des paquets de tracts qui devaient être distribués ensuite à Saint-Brieuc. Sur le trajet, nous avons vu une patrouille et nous avons été obligés de nous cacher".
 
Sur la photo ci-dessous, prise par Pierre Prigent, on voit Ernest Prigent, son père en tenue de F.T.P : "C'était peu avant la Libération, à Uzel. Il y avait eu un accrochage ce jour-là".
Ernest Prigent en tenue de F.T.P à Uzel. Photo prise par son fils Pierre.
Ernest Prigent qui restera très marqué par l'arrestation et la déportation de ses amis protestants, interviendra à de nombreuses reprises lors des cérémonies commémoratives pour leur rendre hommage après-guerre.

Une reconnaissance, la Légion d'Honneur.

Ernest Prigent (1898-1980)
 


Ouest-France dans son édition du 7 septembre 1954 publie un premier article avec une photo pour annoncer « la promotion au grade de Chevalier de la Légion d’Honneur de notre ami Ernest Prigent, ingénieur constructeur, conseiller municipal de Saint-Brieuc depuis la Libération, actuellement trésorier de l’Association Départementale des Déportés et Internés de la Résistance. C’est en effet, au titre de la Résistance que cette distinction vient d’être attribuée à M. Prigent. Lieutenant de réserve, M. Ernest Prigent entra rapidement dans l’action clandestine où il fut le compagnon des héroïques abbé Fleury et Pasteur Crespin. On sait que M. Prigent réussit l’exploit de faire évader un soldat alsacien de l’armée allemande et de l’intégrer dans les F.F.I. Il s’assura notamment dans les régions de Saint-Brieuc et de Loudéac, la liaison entre les groupes de Résistance et contribua au camouflage de nombreux réfractaires du travail et à diriger sur l’Angleterre des aviateurs et parachutistes alliés. Ouest-France adresse ses vives félicitations à M. Prigent pour cette distinction qui lui fait honneur. »

Ernest Prigent reçoit la Légion d’Honneur en novembre 1954 à l’Hôtel de Ville de Saint-Brieuc. L'édition de Ouest-France du 4 novembre 1954 nous en fournit les détails et c'est l'occasion de revenir sur son parcours dans la Résistance. De nombreuses personnalités sont présentes dont Victor Rault, le maire ; M. Royer, maire au moment de la Libération ; des adjoints ; le docteur Hansen, parrain du récipiendaire ; Mme Avril, épouse du défunt préfet Henri Avril ; Adolphe Vallée, président du tribunal de commerce et ancien chef de la Résistance ; Maître Fairier, notaire à La Chèze, conseiller général et maire ; des représentants de différentes associations patriotiques ; Oscar Hansen ; son gendre Jean Huck ; le pasteur Marquer…

Le docteur Hansen, Ernest Prigent, Victor Rault

Légion d'Honneur E.Prigent 5 novembre 1954 Ouest-France

Victor Rault « souligne l’action municipale de M. Prigent, sa compétence en matière de logements, ses idées pour contribuer à résoudre le problème des taudis.
Le docteur Hansen, président de l’A.D.I.F, prononce une émouvante allocution. Les assistants l’écoutent en se reportant 11 ans en arrière. C’est d’abord le rappel de la mort du pasteur Crespin et des camarades déportés, torturés en Allemagne dans les camps nazis ; la mort de Georges Bessis et combien d’autres…
Le docteur Hansen rappelle les arrestations en 1943, le départ en janvier 44, l’activité de M. Prigent, aidant le pasteur protestant à secourir les « déserteurs » alsaciens, en leur procurant un abri, des papiers, un travail, en aidant les réfractaires, les parachutistes qu’il fallait héberger avant de les aiguiller sur l’Angleterre.
M. Prigent a su, grâce à son tempérament, à son intelligence, à ses fonctions de Président des carbonisateurs du département, à son audace et à sa bravoure, servir la Résistance sous toutes ses formes

Ernest Prigent « a conscience d’avoir fait de son mieux pour servir. Il a joué un rôle d’agent de liaison, rôle dangereux, mais il a été bien secondé à son usine de Plémet, dans les contacts avec des résistants, dans les groupes qui s’ignoraient, dans l’étude des plans, des casemates, des réseaux de défense de la côte, renseignements fournis ensuite aux alliés, par postes émetteurs, et M. Prigent termine en montrant la Résistance sous son vrai visage et le beau rôle qu’elle a joué en faisant échec à sept divisions allemandes. »
Rappelons qu’Ernest Prigent occupait le grade de Lieutenant dans les forces de Libération dans le secteur de Plémet-La Chèze.

Dans sa fiche de recensement militaire on apprend aussi que sa Légion d’Honneur lui est attribuée pour son rôle d’agent de liaison « entre le Préfet de Villeneuve et un général en février 1944. Il a occupé d’une façon constante une dizaine de réfractaires au travail forcé en Allemagne. A toujours fait preuve durant l’Occupation d’une attitude courageuse et ferme devant les exigences allemandes comme exploitant forestier. Belle figure de patriote ». Cette nomination comporte l’attribution de la Croix de guerre avec Palme.

Ernest Prigent fut aussi décoré de l'Ordre national du Mérite (une distinction créée par le général de Gaulle en 1963)

Ordre National du Mérite

Pierre Prigent, son fils, se souvient...
Notons que Pierre Prigent, le fils d'Ernest et Hélène, a été marqué par les cours d'éducation religieuse du pasteur Crespin. Par la suite, il va poursuivre de brillantes études. Muni d'un B.A.C passé au Lycée Anatole Le Braz à Saint-Brieuc, il conclut un cursus de théologie à Paris (dont la thèse est tapée par Solveig Hansen), part une année en Allemagne et entre au CNRS où il reste 15 ans. Il aura l'occasion de revenir à St Brieuc pour y donner des conférences (voir la rubrique "Dialogue entre les religions" dans les années 70). Il est l'auteur de nombreux ouvrages dont plusieurs aux éditions Olivétan, d'autres sont publiées aux éditions du Cerf.
 
Pierre Prigent, auteur, né en 1928.

 
Deux témoignages inédits.
Après la lecture du livre Yves Crespin, un chrétien dans la Résistance, Pierre Prigent a confié deux témoignages très intéressants lors d'un entretien téléphonique le 29 juin 2020 :
"Je me souviens qu'un jour dans le cours de l'aumônerie au Lycée Le Braz, avec le pasteur Crespin, nous avions eu une composition sur le Notre Père. En rendant les copies, le pasteur m'a dit : "C'est très bien, vous avez vu qu'il y a deux parties différentes dans cette prière, l'adoration de Dieu et l'aspect pratique".
Pierre Prigent évoque dans ses souvenirs d'enfance les cours de l'aumônerie du Lycée : "J'avais dans ma classe le fils du Préfet (protestant) qui transmettait une image quelque peu déformée et un pasteur qui violait l'ordre établi, un pasteur qui faisait scandale en se faisant emprisonner !"

Ernest Prigent et la carbonisation du bois

Arrivé de Strasbourg, Ernest Prigent va créer une entreprise de carbonisation du bois par gazogène. Après deux fours expérimentaux, il construit cinquante fours métalliques pouvant produire vingt tonnes de charbon de bois par jour. En décembre 1940, avec M. de Lourmel, il implante 50 fours dans la Mayenne, atteignant une production de 50 00 tonnes par an pour les deux sociétés. Malgré son arrestation pendant trois mois en 1943, son entreprise continue de tourner. A la fin de la guerre, le retour de l’essence rend inutile la fabrication de charbon de bois pour les gazogènes. 

Camion avec gazogène, années 40

Ernest Prigent ingénieur et entrepreneur à Saint-Brieuc

Conscient de l’effort énorme de reconstruction du pays, Ernest Prigent prend une nouvelle orientation professionnelle dans le bâtiment à construction rapide. Il obtient un agrément technique grâce à Raoul Dautry, ministre de la Reconstruction dont il avait été attaché de cabinet entre 1925 et 1930. La première maison préfabriquée de Bretagne est construite à Binic et inaugurée par le ministre de la Reconstruction et de l'Urbanisme M.Letourneau en juillet 1947. Le ministre apprécie les explications détaillées de M. Prigent et la rapidité d'exécution d'une telle maison de 10 pièces dont le gros oeuvre est achevé en 15 jours par 4 maçons. Les propriétaires M et Mme Miniou en sont très satisfaits et le Ministre dira lui-même sur place : "Je souhaiterais être propriétaire d'une maison semblable... et j'aimerais aussi pouvoir loger rapidement tous les sinistrés de façon semblable..." (Ouest-France 29 juillet 1947)

Ouest-France 29 juillet 1947
 

Par la suite, M. Prigent fondera quinze Sociétés Civiles Immobilières, représentant 3 500 immeubles ou appartements. C'est ce qui explique qu'Ernest Prigent était très connu comme ingénieur du bâtiment et entrepreneur dans la région de Saint-Brieuc. Reconnaissons que les immeubles construits par Ernest Prigent ne sont pas les plus admirés de nos jours à Saint-Brieuc mais il faut les replacer dans le contexte de l'effort de construction de logements neufs après-guerre.

Dans son engagement au sein du conseil municipal, sous l'étiquette  du Mouvement Républicain Populaire (M.R.P), dans la mouvance du christianisme social et centriste, Ernest Prigent se montre très actif dans tous les programmes de développement du logement pour les classes populaires.

Maisons Prigent. Ouest-France 25 avril 1953

Sa spécialité dans la construction en matériaux préfabriqués, appelée « pierre moulée » lui vaut d'être un pionnier en la matière. Dans une tribune de Ouest-France le 25 octobre 1949 il en présente tous les avantages : une économie de 1 à 4 par rapport à la pierre, le travail est 4 fois moins pénible pour les ouvriers. Ces matériaux utilisés à la Ville Ginglin ont un isolement thermique 3 fois supérieur aux murs en granit, ils sont imperméables, ils permettent de construire jusqu’à 5 étages sans ossature spéciale, de ne pas avoir de variations de température et font réaliser des économies de chauffage.

Annonce Ernest Prigent 13 avril 1954 Ouest-France

En juin 1951, on peut lire dans la presse qu'Ernest Prigent croit au logement bon marché et de qualité. C’est ainsi qu’il participe à une grande souscription au profit du Secrétariat Social en bâtissant une maison qui sera le prix pour le gagnant.

Maison construite par Ernest Prigent 6 juin 1951 Ouest-France

 
En 1952, à la Foire exposition, son stand est remarqué par les visiteurs, et par la presse !

Maison préfabriquée Prigent.12 septembre 1952 Ouest-France

Au mois d’août 1953, Victor Rault, le maire de Saint-Brieuc, visite le chantier de la « Cité Heureuse » rue Cordière qui comptera 42 logements en tout, construits selon les procédés d’Ernest Prigent. L’entrepreneur en profite pour développer son idée de construire des immeubles en hauteur en centre-ville pour abaisser les coûts.

Sur le chantier de l'immeuble rue Cordière 29 août 1953 Ouest-France
En novembre 1953, la première tranche est inaugurée.
Première tranche de l'immeuble 25 rue Cordière 7 novembre 1953 Ouest-France

25 rue Cordière. Image Google

Rue Cordière 7 novembre 1953. Ouest-France

Ernest Prigent est à l'origine d'un important projet immobilier pour lequel une annonce est publiée le 30 avril 1954 dans Ouest-France.

Annonce publicitaire. 30 avril 1954 Ouest-France

Le Parc Radieux dit Ker-Couantic est inauguré en octobre 1954, dans la propriété Champsavin, rue Duguay-Trouin proche du boulevard Lamartine dans le quartier Saint-Michel à Saint-Brieuc. Le premier étage du premier bloc vient de sortir de terre et à cette occasion de nombreuses personnalités sont présentes dont Victor Rault, maire de Saint-Brieuc ; Ernest Prigent, ingénieur et entrepreneur ; M. Bianchi, entrepreneur.


 

Dans son édition du 27 janvier 1955 un journaliste de Ouest-France rend compte de l’avancée du chantier : « Un Caterpillar de 100 CV tirait de la terre, des racines, des souches avec aisance… Ce Caterpillar fait en un jour et demi le travail de deux mois à une vingtaine d’ouvriers.» Le cinquième étage du bâtiment est commencé, le château reçoit des aménagements pour loger plusieurs familles et 60 logements sont prévus à Ker-Couantic.

Entreprise Prigent. Ker-Couantic Saint-Brieuc, 27 janvier 1955 Ouest-France

Entreprise Prigent. Ker-Couantic Saint-Brieuc, 27 janvier 1955 Ouest-France


Sur le chantier de Ker-Couantic à Saint-Brieuc, 27 janvier 1955 Ouest-France


Ker-Couantic en bas de l'image. Vue aérienne.10 février 1960 Ouest-France

Ernest Prigent cesse son activité de constructeur en 1971. Il lègue "son usine de fabrication à son personnel : bâtiments, matériel et stock prêt à la vente représentant 60 millions d'anciens francs. L'inadaptation du personnel à la gestion d'entreprise fit échouer cette expérience qui procédait d'un esprit généreux."

(Informations fournies dans la nécrologie parue dans Ouest-France le 17 janvier 1980)

L'entrée du Parc de Ker-Couantic
Maison de la famille Prigent, sur la droite, dans le parc de Ker-Couantic


La famille Prigent a habité de nombreuses années dans la grande maison située au milieu du parc de Ker-Couantic, immeubles construits par l'entreprise d'Ernest Prigent. (photos ci-dessus)

La petite épicerie à l'entrée du Parc de Ker Couantic. Photo G. Le Ker

La disparition d'Ernest Prigent

La disparition d'Ernest Prigent, le 14 janvier 1980 à Baye, a été marquée dans la presse locale par un long article retraçant sa vie (Ouest-France 17 janvier 1980). Plusieurs avis d'obsèques ont été publiés par la famille ; par les associés, la direction et le personnel de la Société Kaolinienne Armoricaine ; l'Association des Déportés et Internés et familles de Disparus des Côtes-du-Nord dont il était l'ancien trésorier.
La cérémonie, présidée par le pasteur Le Cozannet, a eu lieu le 18 janvier 1980 en l'église Saint-Michel, prêtée pour cette circonstance afin d'accueillir une plus large assemblée. 
 

Si vous avez des éléments pour compléter cet article  (photos, témoignages...) merci d'utiliser le formulaire de contact en haut à droite en laissant votre adresse mail pour une réponse...

 

Sources

Recherches dans les archives de Ouest-France

Archives du temple protestant de Saint-Brieuc.

En 2020 et 2021, entretiens avec Pierre Prigent, fils d'Ernest Prigent

Fiche Ernest Prigent, site Généanet, cliquer ici

Acte de naissance, Plouégat-Moysan, 1898, cliquer ici

Mariage, tables décennales Trémel, page 7, registre 1913-1922, cliquer ici

Recensement militaire, classe 1918 Guingamp, matricule 124, cliquer ici

Un dossier sur Ernest Prigent est conservé au




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